Droit et Société - Volume 38 - Sociologie de la médiation judiciaire - 228

Philippe CHARRIER
L'objectif est d'évaluer le niveau d'investissement dans ces dispositifs qui peuvent
aller de la situation de porteur et/ou d'inventeur des dispositifs à celui du
magistrat qui instille des modifications à un dispositif qu'il découvre et enfin à
celui qui reproduit le fonctionnement tel qu'il l'a trouvé à son arrivée dans la
juridiction. Le troisième indicateur concerne l'appréhension qu'ont les magistrats
du rôle de l'avocat dans un dispositif de médiation et dans la médiation
plus largement. Conçoivent-ils ce rôle comme un obstacle à leur prescription ou
bien un atout ? Intègrent-ils les avocats dans le processus de médiation et pour
quelles raisons ?
Nous avons ainsi placé les magistrats qui ont répondu à notre recherche et
ceux que nous avons interrogés par la suite au cours de l'année 2019 (soit
27 magistrats au total) au sein de cette grille d'analyse. L'analyse nous a permis
de faire émerger un axe qui va du profil du « magistrat médiateur » au « magistrat
pragmatique ». À titre d'exemple, un magistrat qui explique avoir des rapports
réguliers et qu'il considère comme professionnels avec les médiateurs, qui
se déplace pour se rendre compte de l'espace de travail de ces médiateurs, et
qui reconnaît une forte valeur et une spécificité au processus de médiation, sera
par conséquent rangé parmi les « magistrats médiateurs ». Le placement du
magistrat est donc le résultat de la combinaison de l'ensemble des indicateurs et
indices définis plus haut.
Avant de passer à la description des deux idéaux-types, il convient de préciser
que l'ensemble de ces magistrats se retrouvent dans une adhésion, voire une
croyance, dans l'efficacité de la médiation. Le niveau d'attachement est variable
mais aucun ne pense que la présence de la médiation judiciaire soit conjoncturelle
ou bien un engouement passager. Leur manière de l'envisager diverge,
mais ils se retrouvent dans l'évidence de la présence de la médiation
dans l'espace judiciaire.
1. La posture pragmatique : « Ce qui compte, c'est que vous
ayez dans la tête cette possibilité de la médiation » 3
Cette posture regroupe des magistrats prescripteurs de la médiation qui répondent
d'une manière pragmatique aux critères de la place du médiateur, de
leur rôle dans les dispositifs auxquels ils participent et celle des avocats. Ces
magistrats utilisent la médiation avant tout parce qu'il s'agit d'une option procédurale
susceptibles d'être mise en œuvre. De ce fait, elle est intégrée dans
leur travail et semble aller de soi, puisque les textes juridiques le permettent.
Dès lors, on retrouve des profils plus « suivistes » qui ne sont pas à l'origine
des dispositifs même s'ils peuvent contribuer à les faire vivre et se développer.
3. Entretien avec une magistrate d'un TGI.
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Recherches et travaux, vol. 38/2023

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