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RELIRE GIDDENS. ENTRE SOCIOLOGIE ET POLITIQUE

ne peut être compris que dans l’ensemble de ses relations complexes avec d’autres États-nations 50. Pour Bob Jessop, cette approche est réfutable. Cet auteur estime que la vision de Giddens est trop ‘politiste’, et qu’il ne prend pas assez en considération l’idée de l’existence de ressources économiques propres à l’État, et de la fonction de ce dernier en tant que ‘force économique’ au sein du marché. Selon lui, il ne faut pas oublier que l’État est capable de maximiser un énorme pouvoir économique, et ne peut être, ainsi, caractérisé par sa subordination aux logiques et aux impératifs du marché. Par ailleurs, la perception qu’a Giddens de l’État oscillerait entre ‘État-capitaliste’ et ‘système de pouvoir’ 51. S’agissant des similitudes remarquées entre l’approche giddensienne de l’État et les théories autopoïétiques, on peut dire d’abord que, substantiellement, les positions de Giddens divergent de celles des théories systémiques. Pourtant, Bon Jessop 52 a trouvé quelques convergences, dont il retient trois significatives. L’une apparaît lorsque Giddens insiste sur la différenciation entre les divers ordres institutionnels de la société capitaliste, et le fait que le capitalisme moderne s’est développé, en Occident, en raison ‘d’affinités électives’ 53. Cet auteur devine ici, dans la pensée de Giddens, une proximité avec la notion de ‘couplage structurel’ des théories autopoïétiques. En effet, dans cette approche, le ‘système’ et ‘l’environnement’ forment un ‘couplage’ qui, s’il est stable, définit un niveau supérieur d’auto-reproduction 54. Une autre convergence est perceptible quand Giddens souligne que le système étatique moderne exacerbe, au niveau du système de reproduction, un ‘contrôle réflexif’, et qu’il prend en compte le rôle des statistiques officielles dans l’auto-régulation réflexive des sociétés et des États modernes. Enfin, troisième convergence : lorsque Giddens, en définissant l’État moderne comme formation politique, insiste sur l’importance de notions telles que ‘souveraineté’ et ‘gouvernement’, ce qui laisse penser qu’il suit, sur ce point, des idées analogues à celles que l’on trouve dans les théories autopoïétiques qui mettent en avant l’auto-définition et l’auto-référence des systèmes 55 à partir des leurs critères propres. Cependant, entre l’approche giddensienne et celles des théories autoréférentielles, une différence essentielle existe, qui concerne l’action. Pour Giddens, en effet, les processus de structuration s’effectuent à partir d’une ‘dualité structurelle’ qui prend en compte la conduite stratégique des acteurs sociaux ; pour lui, il n’y a pas auto-reproduction du système lui-même, dans

50. Cf. David HELD et John B. THOMPSON, « Editor’s introduction », op. cit., p. 13. 51. Ibid., eod. loc. Voir notamment Bob JESSOP, « Capitalism, nation-states and surveillance », dans David HELD et John B. THOMPSON, Social theory of modern societies…, op. cit., p. 103128. 52. Cf. Bob JESSOP, loc. cit. 53. Sur l’idée d’affinités électives voir, par exemple, Niklas LUHMANN, La légitimation par la procédure, Les Presses de l’Université Laval, 2001. 54. Cf. M. HOLZEM et J. LABICHE, « Couplage et perturbation versus boîte noire et entrée-sortie, ou pour un usage pertinent des ontologies et des modèles pour les systèmes informatisés » (Université de Rouen), sur le site http://gemas.msh-paris.fr 55. Cf. Bob JESSOP, « Capitalism, nation-states and surveillance », op. cit., p. 117.

DROIT ET SOCIÉTÉ, VOL. 55, 2011

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