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RELIRE GIDDENS. ENTRE SOCIOLOGIE ET POLITIQUE

la demande d’État, le développement de la solidarité dans la société, et la production d’une plus grande visibilité sociale 82. Selon le même auteur, les problèmes de l’État-Providence ne se limitent pas à des questions d’ordre institutionnel ; ils sont surtout d’ordre sociétal. En France, par exemple, il y aurait une hyper-socialisation par le haut et une désocialisation à la base. Pour y remédier, il conviendrait d’assurer le développement de la société civile dans des réseaux de solidarité ‘directs’, c’est-à-dire de nouvelles formes non étatiques de solidarité. Par ailleurs, l’État a besoin de plus de transparence, l’État-providence lui-même fonctionne dans un certain « brouillard », les citoyens ne sachant pas où vont les prélèvements sociaux, peu de salariés connaissant le montant réel des charges sociales liées à leur salaire, etc. Il en résulte une irresponsabilité généralisée. Il y a, ici, des proximités avec la pensée de Giddens. Tous deux semblent être d’accord lorsqu’ils montrent que, autrefois, la solidarité sociale était fondée sur l’idée que les risques étaient partagés et qu’ils étaient de nature aléatoire. Aujourd’hui, les ‘pannes sociales’ (chômage de longue durée ou exclusion absolue, par exemple) sont devenues des ‘états stables’, et il s’avère de plus en plus difficile de prendre en charge les problèmes de solidarité sociale via la logique assurancielle. On ne peut pas se contenter d’un ‘État passif-providence’, un système qui vise à compenser les pertes temporaires de revenus (maladies, invalidité, chômage...). On a tort de traiter la question de l’exclusion par des allocations, car le problème social fondamental est, en fait, de redonner aux individus en difficulté une place dans la société. En France, où les problèmes sociaux sont pensés en termes de ‘limitation des dégâts’, domine une vision conservatrice. La crise de l’État-providence révèle un cercle vicieux : elle provoque un nombre croissant d’exclus dans la société, ce qui contribue à développer la pauvreté, cette exclusion engendrant à son tour une crise plus grande des moyens de protection sociale, ce qui contribue à son tour à accroître la crise de l’État-providence. Il en ressort que le temps est venu de développer une nouvelle attitude culturelle par rapport à l’État 83. Elles ne sont donc pas récentes, les idées sur la réforme du système de protection sociale européen. Mais la globalisation s’est imposée comme une donnée incontournable de cette analyse. Giddens l’intègre dans la sienne, en montrant qu’elle a rendu inefficaces les politiques keynésiennes traditionnelles 84. En fait, la globalisation a joué un rôle considérable dans les mutations survenues dans les systèmes de protection sociale européens, en ce qui concerne notamment l’accroissement de la diversité culturelle, l’évolution démographique et le vieillissement de la population. Mais d’autres aspects, comme le progrès
82. Ibid., p. 112, puis 113 et s. 83. Ibid., p. 18. 84. Dans les années 2010, la France, à elle seule, accumule, pour la sécurité sociale, un déficit « autour de 27 milliards d’euros » ! Cf. « Nouveau déficit record pour la Sécurité sociale en 2010 », Le Monde du 8/6/2010. Cf. aussi Julien DAMON, « Vues néo-blairistes sur le modèle social européen », dans Anthony GIDDENS, Patrick DIAMOND, Roger LIDDLE (dir.), Global Europe, Social Europe, Cambridge, Polity Press, 2006 [sur http://www.debateco.fr/content/Vues-n %C3 %A9o-blairistes-sur-le-mod %C3 %A8le-socialeurop %C3 %A9en].

DROIT ET SOCIÉTÉ, VOL. 55, 2011

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http://www.debateco.fr/content/Vues-n

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