Droit et société - Relire Giddens - 1 - 203

CONCLUSION

bre d’autres champs d’analyse 69, tels que l’économie, le politique, etc. Selon eux, le droit ‘dans la société’ droit être saisi ‘non comme substance’, mais en tant que phénomène ancré dans des pratiques et dans des dispositifs 70. Ce positionnement permet de faire le lien avec la théorie de la structuration telle qu’elle a été proposée par Giddens. Reprenons, en l’occurrence, certaines notions majeures qui intègrent ce paradigme et peuvent, à notre sens, être heuristiques pour la sociologie du droit. D’abord celle de ‘règles’, comprises comme dispositifs normatifs qui, avec d’autres types de ressources – d’allocation, d’autorité – sont mobilisés en permanence par les acteurs sociaux dans leurs interactions, voire dans la reproduction des systèmes sociaux. Pour en saisir les effets, dit Giddens, il faut faire appel à la ‘conscience pratique’ et à la ‘conscience discursive’ des acteurs. La notion de ’compétence’, également, qui se réfère aux actions quotidiennes, aux routines, limitée par les conséquences non intentionnelles de l’action. Cela peut révéler beaucoup de choses sur le fonctionnement des institutions juridiques. On est alors au cœur de la notion de dualité du structurel. Comment les acteurs juridiques, politiques, contribuentils à la production, à la reproduction, à la restructuration de leurs propres institutions ? En dépit de son éclectisme, de ses excès combinatoires, de ses effets d’intégration, la théorie de la structuration paraît bien susceptible de participer au renouvellement de la sociologie du droit. Elle a, en effet, une extraordinaire puissance analytique. Nous avons signalé précédemment 71 que, sur le plan méthodologique, cette théorie offre aux chercheurs une possibilité d’insertion, qui peut être simultanée, à quatre niveaux d’analyse : celui de l’émancipation herméneutique de cadres de signification, celui de la recherche de contextes et de formes de conscience pratique, celui de la détermination des limites de compétence des acteurs sociaux, et celui de la précision des ordres institutionnels. C’est ce que j’ai tenté de faire, en particulier, dans une étude sur la constitution du système Schengen de contrôle 72. Mais d’autres terrains du juridique peuvent être investis. On pense à celui de la justice, par exemple ; ou encore à celui de la réception des normes par les profanes : quelles sont les intersections entre différents cadres de signification culturels où s’insèrent les acteurs ‘ordinaires’ ? Des thématiques telles que celle du port du voile 73, par exemple, montrent qu’il peut être profitable d’orienter la recherche socio-juridique vers ce type d’analyse. Par ailleurs, la notion de double herméneutique peut être mobilisée de façon avantageuse par les sociologues du droit ; par là, ils pourraient opérer un va-et-vient avec les milieux qui ont nourri leurs connaissances, et participer ainsi, activement, aux débats sociétaux,
69. 70. 71. 72. Ibid., p. 327-328. Ibid., p. 328. Cf. supra, ch. 1. « La constitution du système Schengen : son impact sur les acteurs locaux du contrôle », op. cit. 73. Voir, entre autres, Claire de GALEMBERT (org.), « Le voile en procès », dossier de la revue Droit et Société, n° 68, 2008. Cf. également Gilles FERRÉOL et Angelina PERALVA, Altérités, dynamiques sociales et démocratie, Paris, LGDJ/Lextenso, 2010.

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DROIT ET SOCIÉTÉ, VOL. 55, 2011

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