Biblio Histoire du droit - Entre amour et droit : le lien conjugal dans la pensée juridique moderne (XVI-XXIe siècles) - 176

CRITIQUE EMPIRISTE DU CARCAN RATIONNEL

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répondent au désir : « les désirs et les autres passions humaines ne sont pas des péchés. Pas plus que ne le sont les actions engendrées par les passions, pour autant qu’il n’y a pas de loi faisant savoir qu’il est interdit de les accomplir » 32. 191. C’est en considérant la procréation et la question de l’autorité sur l’enfant que Hobbes se heurte de nouveau au problème du « couple », mais là encore son nominalisme va triompher. Il est bien obligé, au XVIIe siècle, de partir de l’union de l’homme et de la femme pour envisager la génération, mais il refuse d’en déduire l’autorité des parents sur les enfants comme l’aurait fait un autre rationalisme. L’autorité « ne procède pas tant de la procréation, comme si le parent avait autorité sur l’enfant parce qu’il l’a engendré, que du consentement de l’enfant, soit exprès soit par d’autres déclarations suffisamment explicites »33. Il n’existe que des individus en soi libres et indépendants, même si de fait certains ont nécessairement besoin d’aide34. Il n’y a pas de « relations naturelles » entre parents et enfants indépendamment de l’acte mécanique de génération mais un simple « attrait naturel des deux sexes l’un pour l’autre et pour les enfants »35 duquel on ne déduit rien de juridique. De même, l’autorité ne pouvant appartenir aux deux parents à la fois : no man can obey two masters36, il n’y a pas plus de raison pour que ce soit l’homme plutôt que la femme qui ait le privilège de l’autorité. Hobbes, qui a intégralement détruit l’idée aristotélicienne d’une harmonie sociale fondée sur la complémentarité naturelle entre les hommes37, qui affirme l’égalité par nature de chaque être humain38, ne peut bien sûr pas légitimer « naturellement » une quelconque supériorité de l’homme sur la femme : « bien que certains aient attribué l’autorité à l’homme seulement, car il est du plus excellent sexe, ils ont mal raisonné là-dessus. Il n’y a pas toujours, en effet, assez de différence de force ou de prudence entre l’homme et la femme que le droit ne puisse être déterminé sans guerre »39. À l’état de nature, soit l’autorité sur l’enfant est acquise par accord mutuel, soit, s’il n’y a pas de contrat, « l’autorité est celle de la mère. Car, dans l’état de nature, là où n’existe aucune loi sur le mariage, on ne peut pas savoir qui est le père, à moins qu’il ne soit désigné par la mère […] De plus, attendu que l’enfant est d’emblée au pouvoir de la mère, qui peut ou le nourrir ou l’abandonner, si elle le nourrit, l’enfant doit sa vie à la mère et, donc, il est obligé de lui obéir plutôt qu’à quelqu’un d’autre »40. La nécessité et l’intérêt font la règle, en aucun
32. « The desires, and other passions of man, are in themselves no sin. No more are the actions that proceed from those passions till they know a law that forbids them », idem, p. 226. 33. Idem, p. 324: « is not so derived from the generation, as if therefore the parent had dominion ever his child because he begat him, but from the child’s consent, either express or by other sufficient arguments declared ». 34. Sur la question de la tutelle voir p. 275. 35. Idem, p. 325: « The natural inclination of the sexes, one to another, and to their children ». 36. Idem. 37. Idem, p. 261. 38. Idem, voir le chap. 13, notamment pp. 220 à 222. 39. « Whereas some have attributed the dominion to the man only, as being of the more excellent sex, they misreckon in it. For there is not always that difference of strenght or prudence between the man and the woman as that the right can be determined without war », idem, p. 324. 40. « The dominion is in the mother. For in the condition of mere nature, where there are no matrimonial law, it cannot be known who is the father unless it be declared by the mother [...]. Again, seeing the infant is first in the power of the mother, so as she may either nourish or expose it; if she nourish it,

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