Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 37

Le rôle des États dans le développement des marchés financiers au

XIX

siècle

400 sociétés françaises »47 étaient alors cotées au marché officiel parisien.
M. Arbulu insiste, lui, sur le fait qu'entre 1850 et 1870 l'épargne en actions
fit plus que tripler et que « sous le Second Empire, la Bourse accomplit
pleinement sa fonction de marché primaire », sachant que « les années
1871 à 1913 correspondirent à l'aboutissement d'un marché, organisé,
réglementé et accessible au plus grand nombre. »48. Il n'en reste pas
moins que, comparativement à leurs concurrentes allemandes (cf. infra),
les entreprises françaises firent peu appel au marché pour assurer leur
développement. Cette politique peut s'expliquer par la « culture » propre
des dirigeants français, différente de celles des responsables allemands,
mais elle est peut-être également le résultat de « l'effet d'éviction »
provoqué par les émissions de l'État sur le marché français.

* L'idéal français de l'autofinancement
En France, au XIXe siècle, le marché boursier servit à donner de la
liquidité à la dette publique plus qu'à financer l'industrie, car celle-ci fut
« quasiment absente de la bourse : elle ne représentait que moins de 7 %
de la capitalisation boursière totale jusque dans les années 1920 »49. En
effet, à l'époque, l'idéal des entrepreneurs privés était l'autofinancement,
« car l'endettement était considéré non seulement comme dangereux,
mais immoral », ce qui explique que « ces entrepreneurs, à la différence de
leurs confrères modernes, n'avaient que très rarement des dettes
importantes (Saint-Gobain n'eut pratiquement pas de dette sur toute la
période, jusqu'en 1930) »50. De plus, les actionnaires familiaux craignaient
de perdre le contrôle de leur société en ayant recours à des
financements extérieurs. Enfin, « l'émission d'un emprunt était vue
comme un signe de mauvaise santé financière, susceptible de faire
baisser le cours des actions »51. Pour l'ensemble de ces raisons, les
entreprises eurent recours à des instruments de court ou moyen terme -
escompte - qui évitaient une prise de participation des banques dans les
organes de direction des sociétés.

* Les placements à l'étranger
L'attitude des sociétés françaises face aux marchés financiers n'évolua
un peu qu'à « l'extrême fin des années 1890 » mais « ce retour tardif au
financement externe resta modeste ». En effet, les plus grandes
entreprises conservèrent « entre 1895 et 1913 un taux d'autofinancement
47. HAUTCOEUR P.-C., « Marchés financiers et développement économique : une approche
historique », Regards croisés sur l'économie, mars 2008, nº 3, p. 159-172.
48. ARBULU P., La Bourse de Paris au XIXe siècle, op. cit. p. 214-215.
49. LE BRIS D., Les actions françaises depuis 1854 : analyses et découvertes, Thèse d'économie,
2011, Université d'Orléans, p. 207 (nous changeons le temps des verbes, R.P.) L'auteur
souligne que l'industrie n'a représenté plus de 50 % qu'entre 1948 et 1978.
50. RICHARD J., « La naissance des principes comptables cibles des IFRS », Normalisation
comptable, actualités et enjeux, 2014, Ed. W. Nahum, p. 44-48.
51. LEMARCHAND Y., Du dépérissement à l'amortissement, enquête sur l'histoire d'un concept et de
sa traduction comptable, Thèse Université Paris XII Val de Marne, 1993, p. 532.

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