Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 38

États et marchés financiers

élevé, supérieur à 60 % », à l'exception, cependant, « des firmes créées ou
dominées à l'étranger par des banques françaises »52, qui firent appel
massivement au marché financier, mais dans une logique spéculative, en
cherchant à obtenir une plus-value par des reventes rapides d'actions.
Ainsi, à la veille de la Première Guerre mondiale, la valeur des titres
étrangers détenus, estimée à près de six milliards de francs, était un
montant d'un même ordre de grandeur que celui des titres cotés de
sociétés françaises à l'étranger. Mais, sur le territoire national, parce
qu'elle ne fit pas suffisamment appel au marché financier, l'industrie
française tarda à introduire de nouvelles technologies de production,
perdant ainsi du terrain par rapport à sa principale rivale, l'Allemagne, qui,
elle, s'était élevée à la veille de la Première Guerre mondiale au premier
rang de la production industrielle mondiale (cf. infra).

* La recherche de la sécurité et le débat sur l'effet d'éviction
des émissions publiques
Concernant la France, des économistes considèrent que les émissions
publiques exercèrent « dans la première période, par moments, un effet
d'éviction au détriment des émissions privées, voire de l'investissement »53.
Les investisseurs français auraient privilégié les titres publics et les valeurs
qui s'en rapprochaient le plus - « valeurs à revenu fixe, comme les titres des
sociétés de chemin de fer ou encore les fonds d'État ou de collectivités
publiques étrangers »54- parce qu'ils recherchaient avant tout la sécurité,
surtout après le krach de l'Union générale, le 30 janvier 1882. Cette
faillite brutale, qui toucha une des dix plus grosses capitalisations
boursières, marqua « le début d'une longue déprime boursière (les cours
attendant 44 années pour retrouver en valeur nominale le niveau atteint en
janvier 1882) et d'une grande phase de dépression économique jusqu'à la fin
du siècle »55. C'est également la recherche d'une sécurité accrue qui amena
le Crédit Foncier à réduire ses investissements dans l'immobilier en
refusant « de participer au financement des nouvelles formules de
logement social qui furent alors élaborées »56.
Concernant les banques, le krach de 1882 fut suivi d'une « course aux
guichets », c'est-à-dire d'un retrait massif de la part des épargnants, qui
conduisit Henri Germain (1824-1905), qui avait créé le Crédit lyonnais le
6 juillet 1863, a formuler, le 31 mars 1882, une doctrine « prudentielle »,
52. MARGUERAT P., Banques et grande industrie. France, Grande-Bretagne, Allemagne, 1880-1930,
2015, Les Presses de SciencesPo, p. 281.
53. VERLEY P., Nouvelle histoire économique de la France contemporaine. T. 2. L'industrialisation,
1830-1914, 1989, La Découverte, p. 83.
54. STRAUS A., « Conjoncture économique et marché financier » in GALLAIS-HAMONNO G. et
HAUTCOEUR P.-C. (dir.), Le marché financier français au XIXe siècle, vol. 1. Récit, 2007,
Publications de la Sorbonne, p. 365.
55. LE BRIS D., « Les krachs boursiers en France depuis 1854 », Revue économique, 3/2010
(Vol. 61), p. 421-430.
56. LESCURE M., « La grande dépression immobilière de la fin du XIXe siècle en France », Rives
méditerranéennes, 2013, nº 45, p. 37-54.

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