Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 41

Le rôle des États dans le développement des marchés financiers au

XIX

siècle

l'impôt : la lumière pénétrera du même coup dans un monde spécial,
extérieur à notre marché officiel des valeurs »64.
Mais, le Parquet obtint sa revanche sur la Coulisse avec la réforme de
1898 : l'impôt sur les opérations de bourses fut modifié de sorte que seuls
les agents de change pouvaient le « payer pour les titres inscrits à leur cote
officielle », ce qui signifiait que « pour ces titres (qui étaient nombreux, car
rien ne limitait le droit des agents de change d'allonger leur liste), les
coulissiers ou les banquiers étaient obligés de passer par les agents de
change pour payer l'impôt »65. Les coulissiers furent ainsi privés de la
possibilité de négocier directement des valeurs du Parquet. De plus, la
nationalité française fut exigée pour l'exercice de la profession, alors que
près de la moitié des coulissiers étaient étrangers. La plupart d'entre eux,
cependant, obtinrent leur naturalisation.
Le rétablissement du monopole des agents de change s'accompagna
d'une réduction de leurs commissions mais ils n'eurent pas à en souffrir
car, comme l'ont démontré des spécialistes, la part de marché du Parquet
remonta alors d'1/3 à 2/3 et, au total, la réforme de 1898 ne provoqua pas du
tout un déclin du marché, au contraire même, puisqu'il continua à croître
jusqu'à la Première Guerre mondiale66.
Au demeurant, il ne faudrait pas exagérer le rôle des agents de change et
coulissiers pendant la Belle Époque. En effet, comme le souligne Mme Laure
Quennouëlle-Corre, « la puissance de placement des établissements de
crédit devint alors bien supérieure à celle des intermédiaires de la
Bourse »67 : ainsi, en 1913, la valeur des admissions et introductions à la
Bourse de Paris se montait à 3,9 milliards de francs, mais plus de la moitié,
2,05 milliards de francs, provenait de placements directs aux guichets des
établissements de crédit et des compagnies de chemin de fer.
Si le système financier français fut alors dominé par les banques, celui
de la Grande-Bretagne est réputé l'avoir été par le marché, mais celui-ci fut
incapable de satisfaire les besoins du système industriel national, ce qui
expliquerait l'amorce de déclin économique que le pays connut à la fin du
e
XIX siècle.

64. Cité dans le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires de janvier 2013 sur les
entreprises du secteur financier.
65. HAUTCOEUR P.-C., « Les marchés financiers : péril ou opportunité pour l'industrie ?
Quelques enseignements d'un épisode oublié de l'histoire de la Bourse de Paris », Revue
d'économie financière, 2011/4, nº 104, p. 51-70.
66. HAUTCOEUR P.-C., REZAEE A. et RIVA A., « How to Regulate a Financial Market ? », Paris School
of Economics, Working Paper, 2010, nº 1, en ligne.
67. QUENNOUËLLE-CORRE L., La place financière de Paris..., op. cit. p. 44.

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