Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 59

Le rôle des États dans la répression des marchés financiers au

siècle

de participation ou des crédits à long terme, du fait de la baisse de leurs
ressources réelles totales et de leur engagement dans le financement du
Trésor »4, les établissements bancaires finançant alors largement la dette
de l'État à court terme (dite « flottante ») qui représenta, jusqu'à 1926 inclus,
plus de 30 % de l'ensemble de la dette publique. Pour résister à la
concurrence des banques de dépôts, les banques d'affaires sollicitèrent
intensivement les entreprises privées, ce qui explique également
l'augmentation des émissions. Le marché parisien connut ainsi une hausse
des cours quasi-permanente.
Les banquiers en valeur - coulissiers - participèrent donc à l'embellie
des années 1920. Cependant, du fait du maintien d'une législation
« nationaliste » restrictive, le marché français resta moins ouvert qu'il
n'avait été avant guerre : entre 1914 et 1929, le nombre de valeurs
étrangères cotées à la Bourse de Paris se réduisit puisque 201 furent
radiées alors que 154 nouvelles seulement furent inscrites. Il est vrai que
les investisseurs français furent particulièrement marqués par la
mésaventure des emprunts russes (cf. infra).
De plus, contrairement à la Grande-Bretagne (cf. supra), la France ne
laissa pas se créer un véritable marché des titres d'emprunt émis par
ses colonies. Les émissions étaient strictement subordonnées à
l'autorisation de la Métropole. En particulier, l'Algérie française ne fut
jamais dotée d'un véritable marché financier ouvert aux entreprises, les
échanges se limitant toujours aux seuls titres publics5.
Concernant la monnaie, en attendant que les conditions du retour à la
convertibilité fussent réunies, les agents de change revinrent à leur métier
d'origine en participant à la spéculation sur le cours du franc, mais les
pouvoirs publics attendirent alors des officiers ministériels qu'ils
contribuassent « au bon ordre des échanges », en agissant « le cas
échéant, dans l'intérêt des finances publiques plutôt que dans celui de
leurs clients »6. D'autre part, contrairement à l'idée « de l'existence d'un
régime de flottement pur en France au milieu des années 1920 », il est
établi que les autorités monétaires françaises intervinrent plusieurs fois
sur la marché des changes entre 1924 et 1926, avant que Poincaré n'opèrât
la stabilisation puis la dévaluation du franc par la loi monétaire du
25 juin 1928, qui mit fin au régime de cours forcé du franc et en redéfinit la
valeur métallique à 20 % de sa valeur d'avant-guerre. Mais la crise se
déclencha en France la même année, avant même que ne se fissent sentir
les effets de la crise mondiale qui prit naissance aux États-Unis en 1929
(cf. infra).
4. HAUTCOEUR P.-C., « Environnement macro-économique, transformations du système
financier et financement des entreprises durant l'entre-deux-guerres en France »,
Économies et Sociétés, série A.F., 22, 4-5/1996, p. 293-315.
5. BOUVERESSE J., Un parlement colonial ? Les Délégations financières algériennes, 1898-1945, T. II,
Le déséquilibre des réalisations, Publications des Universités de Rouen et du Havre, 2010.
6. LAGNEAU-YMONET P. et RIVA A., Histoire de la Bourse, 2012, La Découverte, p. 71.

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