Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 63

Le rôle des États dans la répression des marchés financiers au

siècle

expliquerait que « les rendements exigés des obligations aient baissé
fortement dès 1928 » alors que des « placements massifs d'obligations
[eurent] lieu de 1929 à 1931 »19, de sorte que les cours des actions
s'affaissèrent avant même que les conséquences du krach américain ne
se fissent sentir en France. Autrement dit, il ne faudrait pas interpréter la
crise française de 1928 comme l'éclatement d'une « bulle spéculative »,
comme cela se produisit en 1929 aux États-Unis. D'autre part, la
surévaluation du franc, voisine de 10 % entre 1933 et 1936, « révéla la
fragilité de la structure du commerce extérieur français et provoqua
l'effondrement (d'ailleurs inéluctable) de la compétitivité nationale »20. La
convertibilité du franc en or, qui avait été décidée en 1928, fut ainsi
supprimée en 1936. Enfin, les grandes entreprises françaises souffrirent
dans les années trente de conserver toujours une distance trop grande
avec les banques et, partant, avec les marchés financiers, ce qui entrava le
développement des firmes21.

2. Le krach boursier américain
Plusieurs interprétations ont été proposées du krach que la Bourse
de New-York connut en 1929. Celle qui est aujourd'hui la plus largement
acceptée retient l'effet d'un cercle vicieux appelé « credit crunch » parce
qu'il est né de la crainte des banques d'être confrontées à des retraits de
dépôts, du fait d'une augmentation du nombre de faillites bancaires, qui
conduisit ces établissements financiers « à tenter de faire rembourser
leurs crédits passés, à diminuer leurs nouveaux crédits et à augmenter
leurs liquidités, tandis que les faillites qui en résultaient les mettaient en
difficulté et attisaient ainsi la méfiance des déposants »22. Le krach
boursier se transforma en crise économique mondiale parce que la
Réserve fédérale américaine choisit de relever ses taux d'intérêt afin de
limiter l'émission de monnaie, sachant que cette politique déflationniste
fut aggravée par la politique protectionniste du président Hoover qui fit
augmenter les taxes douanières. Les pays européens agirent dans le
même sens et, après la suspension de la convertibilité et de la dévaluation
de la livre sterling suivie de sa dévaluation de 30 % le 21 septembre 1931
(cf. infra) et de celles du dollar, rendu non convertible en avril 1933 avant
d'être dévalué de 41 % le 31 janvier 1934, les autres États qui avaient tenté
de maintenir la convertibilité or de leur monnaie furent également
contraints d'y renoncer (la Belgique en 1935 et la France en 1936, cf. infra).
19. HAUTCOEUR P.-C., « Environnement macro-économique... », op. cit. (nous changeons le
temps des verbes, R.P.).
20. BLANCHETON B., MAVEYRAUD-TRICOIRE S., « Dépréciation du franc et compétition internationale
durant l'entre-deux-guerres » in LÉVY-LEBOYER (dir.), L'économie française dans la
compétition internationale au XXe siècle, 2006, CHEFF, p. 148-167.
21. MARGUERAT P., op. cit. p. 355.
22. HAUTCOEUR P.-C., « La crise de 1929 et ses enseignements. Avons-nous tout oublié ? » in
GRAVEREAU J. et TRAUMAN J. (éd.), Crises financières, 2001, Economica, p. 153-171. Voir du
même auteur, La Crise de 1929, 2009, La Découverte, coll. Repères.

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