Droit et société - La terre de l'autre - 31

INTRODUCTION GÉNÉRALE

ves et dans la loi. De même, l’idéologie foncière peut emprunter la voie de l’autochtonie, ou mobiliser le droit du sol, recourir aux valeurs de la consommation et du paraître social. Quant aux références juridiques impliquées, si elles concernent en priorité la juridicité du mariage, de l’état civil ou du régime de droit personnel, les successions, elles peuvent concerner tous les aspects de la vie du droit, ne serait-ce qu’en raison de la qualité de l’appropriation foncière d’être un fait social total.
D - Caractère systémique du régime

Finalement, on peut accepter l’idée que si un régime est l’ensemble de solutions actualisées ou actualisables expérimentées par les acteurs d’une société, selon les contraintes de règles qui doivent être ajustées au cas par cas, l’appropriation foncière pourra donner lieu à autant de montages, donc de régimes, que les principes d’ajustements l’autorisent pour former des ensembles « discrets ». Ces ensembles étaient peu nombreux tant que les sociétés restaient fermées et que les transformations internes pouvaient être associées à des exigences endogènes. Mais, l’ouverture des échanges et des relations internationales depuis le XVIe siècle, les colonisations puis les politiques dites « de modernisation » durant le XXe siècle et la mondialisation généralisée à partir de la décennie 1990 ont introduit, de manière plus ou moins volontaire, une pluralité de régimes d’appropriation foncière. C’est ce que nous devons envisager maintenant. Une pluralité de régimes d’appropriation foncière, conséquence de la transmodernité Elinor Ostrom dont on retrouvera l’influence dans plusieurs moments de cette recherche, écrivait en 1999 : « Thus, where many individuals will work, live and play in, the next century will be gouverned and managed by a mixed systems of communal and individual proprety rights » 39. Cette reconnaissance de systèmes mixtes passe, pour les tenants du libéralisme économique en matière foncière, par celle des régimes dits de « propriété commune », sous l’influence déterminante des auteurs américains, chercheurs et hommes politiques à l’origine plutôt conservateurs. La conversion de ces auteurs à une nouvelle problématique est donc un moment important qui s’est en particulier concrétisé au sein de l’International Center for Research on Environmental Issues (ICREI) qui organisait la conférence internationale d’Aix-en-Provence tenue du 26 au 28 juin 2006 sur le thème « Les ressources foncières » 40 et où on a vu plusieurs de ces auteurs affirmer leur nouveau credo. Était déjà symptomatique la déclaration de Bruce Yandle que rapportent Mireille et Max Falque dans l’article précité : « je crains que, beaucoup trop longtemps, nous [les te39. « Ainsi, là où travailleront, vivront et joueront de nombreuses personnes, le prochain siècle sera gouverné par un système mixte de droits de propriété individuels et en commun ». Cité et traduit par Mireille et Max FALQUE, « La propriété en commun, un outil de protection et de gestion à long terme, Études foncières, n° 105, sept.-oct 2003, p. 11, note 3. 40. Max FALQUE, Henri LAMOTTE et Jean-François SAGLIO, Les ressources foncières, droits de propriété, économie et environnement, Bruylant, Bruxelles, 2007.

31

DROIT ET SOCIÉTÉ, VOL. 54, 2011
Droit et société - La terre de l'autre

Table des matières de la publication Droit et société - La terre de l'autre
