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LES DOCTRINES FINANCIÈRES PUBLIQUES EN FRANCE AU XIXe SIÈCLE

que celui de la recherche de la vérité générale et permanente ». Cette précision, qui est en l’espèce une sorte de précaution méthodologique, est répétée régulièrement par Paul Leroy-Beaulieu. 238. Cela bien sûr entraîne la possibilité de changer d’idée sur telle ou telle question. Ainsi, de ce fait le discours peut aussi être amené à évoluer au fond. La préface à la troisième édition (1883) en fournit ouvertement un exemple. « On trouvera dans l’édition présente le même souci de l’indépendance d’esprit et de la sincérité. La violence de nos luttes politiques, la forme hautaine des opinions régnantes et des préjugés populaires, tendent à singulièrement ravaler les sciences sociales, à leur enlever toute dignité, toute liberté, toute objectivité, comme disent nos voisins. La plupart des livres qui se publient sur ces sujets et qui ne sont pas de simples manuels versent ou dans l’apologie ou dans le pamphlet. Nous croyons avoir évité cet écueil. Ce n’est pas que nous ayons cherché à ignorer ou à oublier les circonstances et les difficultés actuelles ; cela n’était pas nécessaire, ni utile. […] Il nous était impossible de ne pas tenir compte, dans la troisième édition de ce livre, de ces circonstances nouvelles. […] Il ne se pouvait pas que, sur plus d’un point, les faits nouveaux ne modifiassent quelques-unes de nos idées. C’est ce qui est arrivé en partie sur un sujet capital, les mérites respectifs des impôts directs et des impôts indirects. La sincérité nous oblige à dire que nous sommes, aujourd’hui, un partisan moins déterminé de l’extension des impôts directs. Dès la première édition de cet ouvrage, nous nous sommes efforcés de mettre en parallèle avec impartialité les avantages et les inconvénients de chacune de ces deux grandes catégories d’impôts. Depuis lors, les conséquences fâcheuses d’un système fiscal où les taxes directes prévaudraient sont devenues plus évidentes à nos yeux »45. 239. Paul Leroy-Beaulieu est sans doute un de ceux qui insistent le plus sur cet aspect des choses. Il faut dire qu’à la fin du xixe siècle, il préfigure peut-être un profil un peu particulier parmi les auteurs : celui de l’universitaire, dans des formes encore primitives pour les finances publiques. 240. L’apparition de cette nouvelle figure, si elle ne peut guère nous étonner, explique en partie l’évolution vers une écriture à la fois neutre et pédagogique. Très symptomatique est l’ouvrage d’Edgar Allix, Traité élémentaire de science des finances et de législation financière. Sa première édition, qui paraît en 1907, s’ouvre par une « préface » (datée de 1906). Les éditions suivantes, qui se succèdent rapidement (la deuxième en 1909, la troisième en 1912… il faudra attendre cependant 1921 pour la quatrième), s’ouvrent par un « avertissement ». 241. Est-il besoin de remarquer que les règles du genre font d’une « préface » un texte nettement plus personnalisé qu’une « introduction », qu’un « avantpropos » ou qu’un simple « avertissement » ? Il ne s’agit évidemment pas de dire que la présence d’une préface disqualifie le caractère scientifique de l’écriture, mais simplement de constater que d’une part, elle donne à l’ensemble de l’ouvrage une allure plus personnalisée et qu’elle-même autorise son rédacteur à se livrer bien davantage que dans une simple notice préalable, quel que soit par ailleurs son intitulé. 242. Quoique brèves chez Allix, ces « ouvertures » n’en portent pas moins, dans leurs aspects même la marque de leurs intitulés respectifs. La préface de la
45. Souligné par nous.

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