Systèmes Cours - Droit du commerce et des affaires - 5e - 137

Le régime juridique du commerce

préférence par rapport aux créanciers chirographaires et de faire une
surenchère d'un dixième (puisque ce privilège doit être inscrit).
L'inscription doit avoir lieu au plus tard dans les trente jours suivant la date
de la vente. Ce privilège est en principe efficace pendant dix ans. Il garantit
les trois prix à payer (stock, matériel et outillage, incorporalités).
Mais, au fur et à mesure que l'acheteur paye le prix du fonds, l'assiette du privilège se
réduit (le législateur a prévu un ordre d'imputation du prix versé : les sommes payées
s'imputent tout d'abord sur le prix du stock, puis sur le prix du matériel et de
l'outillage et, enfin, sur le prix des incorporalités, c'est à dire, principalement, sur
celui de la clientèle ; mais les parties sont libres d'imputer le versement fait au
comptant sur celui des trois prix qu'elles souhaitent ; le vendeur tentera donc
fréquemment d'obtenir une imputation du versement au comptant sur le prix des
biens incorporels, car, si l'acquéreur n'est pas un bon gestionnaire, la clientèle
risque d'avoir disparu avant que sa valeur n'ait été payée).

285. Il est évident que, si sa position le permet, le vendeur pourra tenter
d'obtenir des garanties supplémentaires et, p. ex., un nantissement sur le
fonds qu'il vend (cf. infra nº 299 s.). Il peut aussi se faire payer par "billets
de fonds". Ce sont des billets à ordre (cf. supra nº 285), sur lesquels on a
mentionné qu'ils étaient émis en paiement d'un fonds de commerce ; ce
sont donc des effets de commerce bénéficiant de la rigueur cambiaire en
matière de recouvrement.
Enfin, il faut indiquer que le vendeur d'un fonds de commerce a parfois moins de
droits qu'un vendeur de Droit commun. La vente étant un contrat synallagmatique,
le cédant bénéficie de l'exceptio non adimpleti contractus et d'un Droit de demander
la résolution du contrat en cas de non-paiement du prix (voire de rompre
unilatéralement le contrat si la gravité du comportement de l'autre partie le justifie).
Toutefois, comme on l'a vu (cf. supra nº 282), ici, pour protéger les créanciers de
l'acheteur, le vendeur de fonds de commerce ne peut pas exercer librement son
droit de résolution : il ne peut le faire que s'il a mentionné son intention
(d'éventuellement demander la résolution en cas de non-paiement) en même temps
qu'il a inscrit son privilège (C. com., art. L. 141-6, al. 2 ; il s'agit cependant d'une
formule de style et, en pratique, cette mention est systématique).

286. Mais, si le législateur est intervenu, c'est essentiellement pour
protéger l'acheteur du fonds de commerce. C'est lui qui fait l'objet de la
plus grande sollicitude des textes, car il a à craindre que le contenu du
fonds ne soit pas à la hauteur de ses espérances (il acquiert
principalement une clientèle et le vendeur a pu, dolus bonus, un peu trop
vanter sa qualité). L'acheteur bénéficie des garanties de Droit commun
prévues pour toute vente.
On a vu (cf. supra nº 247) qu'au titre des articles 1625 et suivants du Code civil, il
pouvait invoquer la garantie contre l'éviction et contre les troubles de jouissance en
cas de tentative de reprise, par le vendeur, de la clientèle cédée ; il peut aussi
invoquer la garantie des vices cachés (cf. infra nº 358) mais non juste pour une
inexactitude du chiffre d'affaires (Cass. com., 11. janv. 2017, nº 15-22-382).

Mais c'est la procédure de purge des sûretés (il ne s'agit pas, stricto
sensu, d'une purge des dettes, puisque c'est un bien qui est cédé, même si
l'opération conduit à un résultat voisin) qui constitue, pour l'acquéreur, la
garantie fondamentale de la technique de la vente du fonds de commerce

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