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La décision financière publique

La décision financière se distingue par son objet. Gérer les
finances est une activité qui comporte de forts particularismes
consacrés par des règles spécifiques. Toute l’histoire de ce droit est
dominée par la recherche d’une conciliation de deux exigences.
L’une, politique, est la légitimation de décisions qui portent sur la
propriété (impôts) ; l’autre, économique ou managériale, vise à
optimiser la décision dans ses multiples facettes. C’est aussi l’histoire d’une cohabitation des experts et des politiques entre lesquels
le pouvoir est partagé.
On aurait pu tenter d’appliquer de manière méthodique les
théories de la décision aux finances publiques1. La voie choisie,
l’étude du pouvoir financier à partir des règles qui l’organisent afin
d’expliquer comment la décision se forme, donne au sujet toute
son actualité, qui fut un des fils rouges du colloque : la crise des
finances publiques résulte aussi d’un dérèglement des mécanismes
de décision dont elle appelle la révision. Henry Becque écrivait
que « la décision est souvent l’art d’être cruel à temps ». N’est-ce
pas parce que les responsables politiques avaient les moyens de
retarder les mesures douloureuses que les temps sont devenus si
cruels ? Et n’est-ce pas parce que les enjeux financiers ont été
insuffisamment soumis à l’examen de la volonté des citoyens et
des responsables politiques que la situation financière s’est tellement dégradée ?
Sur ce vaste sujet, nous limiterons notre propos à deux
constats ou thèses : la terrible crise des finances publiques n’est ni
conjoncturelle, ni surprenante ; elle est le résultat de processus de
décision non maîtrisés. Surmonter cette crise exige de mettre la
décision financière au cœur du débat politique et de mieux l’encadrer de règles de fond, car le raffinement des procédures a montré
ses limites et il faut prendre acte de la fin du pouvoir politique
discrétionnaire et des idées de souveraineté en cette matière.

1. Plusieurs disciplines des sciences sociales accordent une grande attention à cette
notion. Les optimistes proposent des modèles formalisés et mathématiques faisant
appel aux théories de la probabilité ou des jeux afin de déterminer des cheminements optimaux : H. A. S imon , R. M. C yert , J. G. M arch . Les pessimistes
démontrent que les choix collectifs ne sont jamais optimaux en raison des conditions dans lesquelles ils s’opèrent. D’autres auteurs considèrent que les organisations sociales formalisées, entreprises ou administrations, constituent en tant que
telles des systèmes de décision, ce qui est assez bien illustré par les administrations
financières. Certaines théories sont plutôt inspirées de la psychologie et d’autres de
la sociologie.

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