Précis Domat - Droit des personnes - 2e - 225

LE VACILLEMENT DES PERSONNES CORPORELLES (LES INCAPACITÉS)
si son état le lui permet (alinéa 1) ». Cela ne préjuge pas, du reste, de savoir si le
majeur doit informer son tuteur, ce qui est le cas, par exemple, pour une demande
de carte d'identité que le majeur peut former seul sous réserve que son tuteur en
soit préalablement informé176
. Puis le texte énonce, à l'alinéa 2, ce qu'il advient si
la personne protégée n'est pas à même « de prendre seul[e] une décision éclairée » :
le juge (ou le conseil de famille s'il a été constitué) peut prévoir qu'elle bénéficiera,
pour tous les actes relatifs à sa personne ou certains d'entre eux, de l'assistance de
la personne chargée de sa protection (le modèle de l'assistance prévaut donc bien) ;
si cela ne suffit pas, le juge peut, le cas échéant après le prononcé d'une habilitation
familiale ou l'ouverture d'une mesure de tutelle, autoriser la personne habilitée ou
le tuteur à représenter l'intéressé, y compris pour les actes ayant pour effet de porter
gravement atteinte à son intégrité corporelle. Le législateur a prévu la possibilité
d'un désaccord entre le représentant et la personne protégée : « sauf urgence », le
juge tranche, à la demande de l'un, l'autre ou d'office, en autorisant l'un ou l'autre
à prendre la décision (alinéa 2, in fine). Toutefois, le protecteur ne peut prendre de
décision qui affecterait gravement l'intimité de la vie privée de la personne ; il doit
en ce cas requérir l'autorisation du juge, sauf urgence (alinéa 3). Enfin, le protecteur
peut, sans solliciter d'autorisation, et moyennant information du juge après
coup mais sans délai, prendre une mesure strictement nécessaire destinée à mettre
fin au danger que le propre comportement de la personne protégée lui fait courir
(alinéa 4)177
.L'apport de la loi de 2019 est le suivant : alors que sous l'empire de la
loi de 2007, le tuteur (représentation) ou le curateur (assistance) intervenaient seuls
en cas d'urgence ou lorsque la décision à prendre ne portait pas gravement atteinte
àl'intégrité corporelle ou à l'intimité de la vie privée, ces deux domaines sont
désormais décorrélés et le juge peut d'emblée autoriser le représentant à décider
d'un acte portant gravement atteinte à l'intégrité corporelle de l'intéressé. Le juge
interviendra alors seulement en cas de désaccord entre protecteur et protégé.
Comme elle l'a fait à propos des actes purement personnels, la Cour de cassation
a, en ce qui concerne des soins psychiatriques, projeté le régime de l'article 459 du
Code civil sur le plan procédural en jugeant qu'une personne sous curatelle pouvait
seule interjeter appel de la décision d'un juge des libertés et de la détention qui
avait ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète de cette personne à la
demande d'un tiers178
.
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S'agissant, précisément, des actes relatifs à l'intégrité corporelle, et plus généralement
à la santé, l'ordonnance du 11 mars 2020 a voulu remédier à l'absence de
clarté découlant de l'articulation du Code civil et du Code de la santé publique. En
principe, tant en vertu de l'adage specialia generalibus derogant que de la lettre de
l'article 459-1 du Code civil, c'est le Code de la santé publique qui prévaut. Mais
ce dernier procède par catalogue de pratiques (don du sang, don d'organes,
■ 176. Décr. nº 55-1397 du 22 oct. 1955, modif. par. Décr. nº 2021-279 du 13 mars 2021 portant diverses
dispositions relatives à la carte nationale d'identité et au traitement de données à caractère personnel
dénommé « titres électroniques sécurisés » (TES), JO 14 mars et Arr. du 13 mars 2021.
civ., 27 février 2013, Dr.fam. 2013, nº 58, obs. MARIA.
■ 177. Voir Cass. 1re
■ 178. Cass. 1re
civ., 5 juillet 2023, D. 2023, p. 1498 et s., obs. J.-J. LEMOULAND et G. RAOUL-CORMEIL.La
cour d'appel avait déclaré l'appel irrecevable pour défaut de capacité. Le pourvoi en cassation a été
accueilli au visa des articles 415 et 459 du Code civil et de L. 3211-12 du Code de la santé publique.
Deuxième partie : Personnes corporelles
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http://www.RAOUL-CORMEIL.La
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