Précis Domat - Droit des personnes - 2e - 279

L'EMBRYON
B. ENJEUX DU RÉGIME DE LA RECHERCHE SUR
LA QUALIFICATION DE L'EMBRYON HUMAIN
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Il n'est pas ici question d'évaluer les changements législatifs au regard du droit
de la bioéthique mais de se demander si, du point de vue de la qualification juridique
de l'embryon in vitro, les choix du législateur en 2013 et en 2021 changent fondamentalement
l'équilibre réalisé en 1994. À cette fin les griefs articulés à chaque fois
par les opposants au texte devant le Conseil constitutionnel, ainsi que la réponse de
ce dernier, méritent attention.
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En 2013, la saisine portait sur le non-respect des objectifs d'accessibilité et
d'intelligibilité de la loi, sur l'empiétement du pouvoir législatif par le pouvoir exécutif,
sur le non-respect du principe du contradictoire, et, bien sûr, sur la violation
des articles 16 et suivants du Code civil et, notamment, du principe de dignité de la
personne humaine80
. Sur aucun de ces points, les requérants n'obtinrent gain de
cause, le système d'autorisation étant, selon le Conseil constitutionnel, entouré de
garanties effectives :
« Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, si le législateur a modifié certaines
des conditions permettant l'autorisation de recherche sur l'embryon humain et sur
les cellules-souches embryonnaires à des fins uniquement médicales, afin de favoriser
cette recherche et de sécuriser les autorisations accordées, il a entouré la délivrance de
ces autorisations de recherche de garanties effectives ; que ces dispositions ne méconnaissent
pas le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine »81
.
Il est bien vrai que c'était en vain que ce principe était invoqué, tant la loi et la
jurisprudence sont claires sur l'inapplication du principe de dignité à l'embryon. La
véritable question est de savoir si, du fait du passage d'une interdiction/dérogation
à une autorisation, l'embryon se trouve plus réifié qu'avant. La question n'appelle
pas de réponse univoque ni simple.
D'un côté, étant donné que l'interdiction était soumise à dérogation et que, par
conséquent, des pratiques d'expérimentation existaient et qu'elles aboutissaient forcément
à la destruction de l'embryon, on peut douter d'un réel changement. L'embryon
in vitro n'est ni plus ni moins disponible du fait que, dans les textes, on a
remplacé une interdiction/dérogation par une autorisation encadrée. La véritable
rupture, si rupture il y a, date de 2004 (interdiction/dérogation) plutôt que de
2013. Et les embryons in vitro sont au fond moins des aliens qu'en 2004 car ils
sont entrés dans le giron des autres éléments et produits du corps humain, disponibles
sous des conditions plus ou moins strictes, ainsi que dans celui de l'expérimentation
humaine, strictement encadrée.
D'un autre côté, il serait hypocrite de nier que les évolutions récentes ont tendu,
sous la pression de divers facteurs (compétitivité de la recherche, course à l'innovation
thérapeutique et au brevet, montée en puissance de l'assistance médicale à la procréation),
à accroître la disponibilité des embryons in vitro82
■ 80. Cons. const., 1er
■ 81. Cons. const., 1er
août 2013, nº 2013-674 DC.
août 2013, nº 2013-674 DC, cons. 17.
■ 82. Il semble devenu difficile de se passer de ce matériau précieux. Alors que l'Allemagne interdit
depuis 1990 la recherche sur l'embryon (voir § 1(2) et § 2 de la loi du 13 décembre 1990), une loi du
28juin 2002 prévoit une dérogation (possibilité d'importer cellules souches embryonnaires prélevées en
Troisième partie : Corps sans personne
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. Certes, il est toujours interdit
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