Précis Domat - Droit des personnes - 2e - 340

DROIT DES PERSONNES
liste de résultats, affichée à la suite d'une recherche effectuée à partir du nom d'une
personne, des liens vers des pages web, publiées par des tiers et contenant des informations
relatives à cette personne, également dans l'hypothèse où ce nom ou ces
informations ne sont pas effacés préalablement ou simultanément de ces pages
web, et ce, le cas échéant, même lorsque leur publication en elle-même sur lesdites
pages est licite » (§ 62). Nul besoin que l'inclusion de l'information en question dans
cette liste cause un préjudice à la personne : le droit de cette dernière prévaut non
seulement sur l'intérêt économique de l'exploitant du moteur de recherche, mais
également sur l'intérêt de ce public à accéder à ladite information lors d'une recherche
portant sur le nom de cette personne. Toutefois, la Cour ajoute avec prudence :
« Cependant, tel ne serait pas le cas s'il apparaissait, pour des raisons particulières,
telles que le rôle joué par ladite personne dans la vie publique, que l'ingérence dans
ses droits fondamentaux est justifiée par l'intérêt prépondérant dudit public à avoir,
du fait de cette inclusion, accès à l'information en question » (§ 97).
Ce droit au déférencement semble avoir correspondu à un besoin puisqu'en
quelques mois Google a dû faire face à des dizaines de milliers de demandes d'effacement
par des personnes ne voulant plus laisser de traces numériques d'elles sur
la toile47
. Plus récemment, dans l'affaire Proximus, la même Cour a énoncé que les
abonnés doivent avoir la possibilité de faire supprimer leurs données à caractère
personnel des annuaires et que la demande d'un abonné tendant à la suppression
de ses données peut être considérée comme un recours au droit à l'effacement au
sens du RGPD48
qui, du reste, s'inscrit dans un mouvement plus vaste49
.
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. Notre
société est décidément prise dans une tension très forte entre deux mouvements
contraires : un droit à l'identité et un droit à l'oubli50
Ainsi ne peut-on pas prétendre que face au traitement de ses données personnelles,
la personne soit démunie : la loi lui fournit bien une palette de prérogatives
assez précises - au premier rang desquelles un droit à l'information sans lequel ces
droits sont des coquilles vides51
- quand bien même des dérogations sont prévues
■ 47. Voir J. ROCHFELD et V.-L. BENABOU, À qui profite le clic ? Le partage de la valeur à l'ère numérique,
Odile Jacob, 2015, p. 98.
■ 48. Voir supra, nº 319.
■ 49. CEDH, 4 déc. 2008, nº 30562/04 et 30566/04, Marper c/Royaume-Uni (à propos du fichier britannique
d'empreintes génétiques) ; CEDH, 18 avr. 2013, nº 19522/09, M.K. c. France, sur le FNAED : reconnaissance
d'un droit à l'effacement des données des personnes ayant bénéficié d'un acquittement, d'une
relaxe, d'un classement sans suite ou d'un non-lieu ; CEDH, 18 septembre 2014, nº 21010/10, Brunet c.
France (à propos du STIC, système de traitement des infractions constatées). Adde : Cons. const.,
nº 2014-412 QPC du 19 septembre 2014 ; Décret nº 2021-1402 du 29 octobre 2021 modifiant le Code de
procédure pénale et relatif au fichier national automatisé des empreintes génétiques et au service central de
préservation des prélèvements biologiques, JO 30 octobre.
Sur l'histoire du fichage, voir le catalogue de l'exposition Fichés ? Photographie et identification 18501960,
Perrin, 2011 (exposition ayant eu lieu aux Archives nationales).
■ 50. J.-P. MARGUÉNAUD, RTDciv. 2022, p. 347 et s.
■ 51. « Le droit à l'information s'exerce dans les conditions prévues aux articles 12 à 14 du règlement
(UE) 2016/679 du 27 avril 2016.
En particulier, lorsque les données à caractère personnel sont collectées auprès d'un mineur de moins de
quinze ans, le responsable de traitement transmet au mineur les informations mentionnées à l'article 13 de
ce règlement dans un langage clair et facilement accessible » (art. 48 al. 1 et 2 de la loi).
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