Précis Domat - Droit des personnes - 2e - 99

L'IDENTIFICATION DES PERSONNES CORPORELLES
publiques mais aussi privées et qu'illustre bien la technique du recensement de la
population, pratiqué en France depuis 1801.
La vie sociale impliquant des déplacements et la liberté d'aller et venir étant
constitutionnellement garantie92
, comment déterminer le domicile d'une façon qui
ne soit pas trop contraignante ? Le Code civil fixe un critère, celui du « principal
établissement » (C. civ., art. 102 al. 1) : « Le domicile de tout Français, quant à
l'exercice de ses droits civils, est au lieu où il a son principal établissement ». Le
domicile que toute personne corporelle doit donc avoir est au lieu qu'elle choisit, ce
qui implique deux éléments, l'un matériel, l'autre intentionnel. Matériellement, il
peut s'agir de sa résidence familiale, de l'endroit où se trouvent ses centres d'intérêt,
notamment économiques, ou encore de l'endroit où elle exerce sa profession.
Son caractère potentiellement définitif est donc la marque du domicile, alors que la
résidence, lieu où la personne séjourne effectivement de façon durable, peut être
provisoire, ce qui n'empêche pas la résidence, comme critère juridique de localisation,
de concurrencer fortement le domicile93
.
La détermination du domicile requiert aussi un élément volontaire : l'animus,
l'intention de faire de tel lieu son principal établissement. Autant on ne change
pas si facilement de nom ou de prénom, autant le législateur accorde ici à la volonté
individuelle une forte place : « le changement de domicile s'opérera par le fait
d'une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l'intention d'y fixer son principal
établissement » (C. civ., art. 103). « La preuve de l'intention résultera d'une déclaration
expresse, faite tant à la municipalité du lieu que l'on quittera, qu'à celle du
lieu où l'on aura transféré son domicile » (C. civ., art. 104). Et « à défaut de déclaration
expresse, la preuve dépendra des circonstances » (art. 105), appréciées par le
juge en cas de litige.
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Soucieux d'ancrer les personnes dans un lieu repérable, le droit prévoit des
règles spécifiques à trois catégories de personnes.
D'une part, dès l'origine, le Code civil a prévu un régime spécifique pour les bateliers,
également fondé sur l'élection de domicile (C. civ., art. 102 al. 3). Et, au-delà des
bateliers, on a beau être sans domicile fixe ou selon la terminologie récente « sans
domicile stable », on doit juridiquement élire domicile soit auprès d'un centre communal
ou intercommunal d'action sociale, soit auprès d'un organisme agréé, si l'on veut
bénéficier des prestations sociales, exercer ses droits civils, être inscrit sur les listes électorales,
se voir délivrer un titre national d'identité, prétendre à l'aide juridictionnelle94
.
■ 92. Voir décision Conseil const. nº 93-325 DC13 août 1993. L'espace européen s'est lui aussi construit
sur cette notion de liberté de circulation (des marchandises, des personnes et des services) : voir
l'article 26.2 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
■ 93. Voir B. TEYSSIÉ, Droit des personnes, op.cit., Litec, 24e
éd., 2022, p. 426, nº 688.
■ 94. Voir, pour les « sans domicile stable », CASF, art. L. 264-1 et s. modifiés par l'article 46 de la loi
nº 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (dite ALUR), JO 26 mars,
puis par la loi nº 2017-86 du 27janvier 2017 relative à l'égalité et la citoyenneté, JO 28janvier, puis l'ordonnance
nº 2020-1733 portant partie législative du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit
d'asile, J0 30 décembre. Ce même article 46 a ajouté à l'article 102 du Code civil un nouvel alinéa (actuellement
alinéa 2) : « Le lieu d'exercice des droits civils d'une personne sans domicile stable est celui où elle
a fait élection de domicile dans les conditions prévues à l'article L. 264-1 du code de l'action sociale et des
familles ». Pour les « gens du voyage », on renverra à la loi nº 69-3 du 3janvier 1969 relative à l'exercice
des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni
Deuxième partie : Personnes corporelles
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