Cours - Droit de l'Union européenne - 3e - 361

La primauté du droit de l'Union

communautaire. Mais ces dispositions apparaissent surtout comme des pétitions de principe en faveur du droit international général au lendemain du deuxième conflit
mondial. Elles sont en tout cas indissociables de l'article 54 de la Constitution (voir
encadré) qui instaure un contrôle de constitutionnalité préalable à l'application par la
France de ses engagements internationaux dans son ordre interne. Or, la lecture de cet
article ne permet nullement de conclure à une primauté du droit international ou du droit
communautaire dès lors que la décision appartient au cas par cas au Conseil constitutionnel ; de surcroît, en l'absence de révision constitutionnelle, c'est bien l'ordre constitutionnel interne qui finit par prévaloir.

Texte de l'article 54 de la Constitution
« Si le Conseil constitutionnel, saisi par le président de la République, par le Premier ministre,
par le président de l'une ou l'autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs,
a déclaré qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution,
l'autorisation de ratifier ou d'approuver l'engagement international en cause ne peut intervenir
qu'après révision de la Constitution. »

Sur la base de cet article qui fait ainsi figure de verrou de sécurité face à l'introduction du
droit international ou communautaire dans l'ordre interne36 (comme le souhaitaient du
reste les auteurs de la Constitution), le Conseil constitutionnel a plusieurs fois eu l'opportunité d'examiner l'éventuelle contrariété du droit communautaire primaire avec la
Constitution. D'une jurisprudence maintenant particulièrement fournie se dégagent les
principales indications suivantes.
Ayant abandonné la distinction, au demeurant bien peu pertinente, entre les limitations
de souveraineté (autorisées) et les transferts de souveraineté (interdits) qu'il avait avancée
en 197637, le Conseil s'attache aujourd'hui à rechercher si le droit communautaire primaire
contrarie une ou plusieurs dispositions de la Constitution ou porte atteinte « aux conditions
essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ». Adoptée à l'occasion de la décision
Maastricht I38, cette grille d'analyse n'a pas été démentie par la suite. Elle a toutefois été
affinée lors de la décision Amsterdam39, d'où il ressort que ce sont moins les transferts de
compétence qui sont condamnés par le Conseil que les modalités d'exercice de ces compétences par l'Union européenne ; en l'occurrence, le fait que la prise de décision passe de
l'unanimité à la majorité qualifiée, privant ainsi la France de son droit de veto, est considérée comme de nature à porter atteinte « aux conditions essentielles d'exercice de la
souveraineté nationale ».
Ce concept prétorien, qui laisse au juge constitutionnel une appréciable marge d'appréciation, est devenu capital ; véritable filtre de la constitutionnalité, il a été utilisé dans la
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36. Sur ce point, v. C. BLUMANN, « L'article 54 de la constitution et le contrôle de la constitutionnalité des traités en France »,
RGDIP, 1978, p. 537.
37. Décision des 29 et 30 déc. 1976, nº 76-71, Rec. p. 15.
38. Décision du 9 avr. 1992, nº 92-308, Rec. p. 55.
39. Décision du 31 déc. 1997, nº 97-394, Rec. p. 344.

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