Cours - Droit de l'Union européenne - 3e - 473

La constitutionnalisation de la CJUE
521 Pour le doyen Favoreu, « les membres (des juridictions constitutionnelles) doivent être
désignés par des autorités politiques élues, ce qui leur confère une légitimité démocratique »18. Aux termes du traité de Lisbonne, qui reprend sur ce point le traité constitutionnel
- lui-même reprenant les dispositions antérieures - les juges et les avocats généraux de la
Cour et du Tribunal sont « nommés d'un commun accord par les gouvernements des États
membres »19. Or les autorités gouvernementales des États membres bénéficient de la légitimité démocratique - et par voie de conséquence les juges de l'Union bénéficient de la
chaîne de légitimité démocratique - et de surcroît de la légitimité étatique dans une construction égalitaire où les États demeurent maîtres des traités.

Toujours, selon, le doyen Favoreu, la Cour de justice n'est pas une juridiction constitutionnelle car ses « membres ne sont pas choisis par les forces politiques composant le
parlement qui, au surplus, n'est pas lui-même le législateur »20. Cette observation ne
paraît pas vraiment convaincante parce que la plupart des membres des juridictions constitutionnelles ne sont pas désignés par les seuls parlements nationaux - et que par ailleurs
on ne peut raisonnablement dénier au Parlement européen, dans le cadre du traité de
Lisbonne, prolongement du traité constitutionnel, qui a renforcé ses pouvoirs, la qualité de
co-législateur avec le Conseil. En outre, le droit européen n'interdit pas aux parlements
nationaux d'intervenir dans la sélection du candidat de leur pays à la fonction de juge dans
le cadre de l'Union, comme en témoigne l'exemple autrichien (article 23c § 2 de la Constitution autrichienne). Toutefois, comme le suggéraient plusieurs Conventionnels, on aurait
pu revoir la procédure de désignation, la communautariser, en disposant que la nomination
devait être effectuée par le Conseil statuant à la majorité qualifiée et après approbation du
Parlement européen (voir la proposition d'amendements de Brock et autres)21.
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Convention européenne (2002-2003), proposition d'amendement
à l'article I-29 de Elmar Brok et de 25 autres conventionnels
« 2. (...). Les juges de la Cour de justice et du tribunal de grande instance, et les avocats généraux de la Cour de justice, choisis parmi des personnalités offrant toutes garanties d'indépendance et réunissant les conditions requises à l'article [xx] de la partie II, sont nommés par le
Conseil statuant à la majorité qualifiée, avec l'approbation du Parlement européen pour une
période de huit ans non renouvelable. »

Cette solution, permettant la nomination des membres des juridictions de l'Union par
plusieurs autorités, dont le Parlement européen qui jouit d'une véritable légitimité démocratique, aurait certainement assis davantage encore la légitimité de la Cour de
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18. L. FAVOREU, « Quel(s) modèle (s) constitutionnel(s) ? », in Vers un droit constitutionnel européen. Quel droit constitutionnel européen ?, RUDH 1995, p. 359.
19. Articles 19 § 2 TUE (I-29 § 2 TC) ; articles 253, alinéa 1 TFUE (III-355, alinéa 1) ; article 254, alinéa 2 TFUE (III-356, alinéa 2).
20. L. FAVOREU, « La notion de cour constitutionnelle », in De la Constitution. Études en l'honneur de Jean-François Aubert, Bâle,
Genève, Munich, Helbing et Lichtenhahn, 1996, p. 25.
21. Voir également la proposition d'amendements de Borell et autres, celle de MacAven, Voggenhubert et autres, celle de Linda
McAvan.

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