Bibliothèque de droit de l'environnement et de l'urbanisme - L'office du juge des référés en droit de l'urbanisme - 109

L'APPRÉCIATION LIMITÉE DE LA CONDITION D'URGENCE PAR LE JUGE DES RÉFÉRÉS

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A. LA PRISE EN COMPTE PAR LE JUGE DES RÉFÉRÉS
DES EFFETS DE LA DÉCISION D'URBANISME
POUR L'APPRÉCIATION DE LA CONDITION D'URGENCE
206. Pour apprécier la condition d'urgence en matière d'urbanisme, le juge des
référés prend en compte les effets que produit la décision objet du recours. Dans sa
décision du 19 janvier 2001 « Confédération nationale des radios libres », le Conseil
d'État énumère la typologie des effets constitutifs d'une situation d'urgence. Il ressort de cette jurisprudence qu'il y a urgence lorsque la décision administrative
contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt
public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre  (1). En
matière d'urbanisme, cette appréciation de l'urgence a eu des incidences importantes par rapport à celle qui prévalait sous l'ancien régime du sursis à exécution (2).
1. L'atteinte suffisamment grave et immédiate à un intérêt public,
à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre
207. Dans les trois hypothèses susmentionnées, le préjudice doit comporter
deux caractéristiques cumulatives : il doit être suffisamment grave et immédiat5.
S'agissant de la gravité du préjudice, cela signifie que l'atteinte causée par la
décision litigieuse doit présenter une « certaine intensité »6, il ne suffit pas
qu'elle provoque un simple désagrément matériel, professionnel ou familial7, ni
même une simple gêne8.
208. La gravité du préjudice peut être reconnue lorsque l'acte ou le comportement de l'administration préjudicie à la situation du requérant. Ce préjudice peut
être de nature financière, morale ou encore, s'agissant du contentieux de l'urbanisme, d'ordre esthétique ou urbanistique. Concernant ce dernier, l'affectation aux
conditions d'habitabilité des propriétés des requérants par un arrêté accordant un
permis de construire est de nature à caractériser l'urgence à obtenir sa suspension et
cela sans qu'il soit nécessaire d'attendre le début des travaux9. Il en va, par exemple,
ainsi lorsque l'exécution des travaux projetés, susceptible d'être entreprise à tout
moment, aurait pour effet de remplacer une clôture par un mur10.
209. Les organisations syndicales, professionnelles et les associations bénéficient elles aussi de la capacité juridique de mettre en œuvre des procédures d'urgence. Or ces dernières sont, au demeurant, particulièrement actives en matière
d'urbanisme notamment, en vue de la défense de l'environnement.
210. Il peut enfin y avoir urgence si l'acte ou le comportement litigieux préjudicie à un intérêt public. Pour le professeur Cassia ce n'est que rarement que le
5. CE sect., 19 janvier 2001, Confédération nationale des radios libres, req. no 228815, RFDA,
2001, p. 378, concl. Touvet ; AJDA 2001, p. 150, chr. Gyomar et Collin.
6. CASSIA (P.),   Les référés administratifs d'urgence, LGDJ, collection système droit, 2003,
Paris, p. 96.
7. Voir par exemple : CE réf. 27 juillet 2001, Médard, req. no 235463.
8. CE 10 avril 2002, Araye, req. no 238471.
9. CE 27 juillet 2001, Commune de Meudon, req. no 231991, Lebon, T. 1115 ; Constr-Urb. 2001,
no 236, obs. Cornille ; RDi. 2001, p. 541, obs. Soler-Couteaux ; Gaz Pal 20-21 mars 2002, Pan, p. 28 ;
BJDU 2001, p. 381 concl Chauvaux relevant les conséquences « difficilement réversibles » de l'exécution d'un permis de construire.
10. CE 28 décembre 2001, commune de Béziers, req. no 237137, Collectivités territoriales-intercommunalité, 2002, comm. 69, note T.  Célérier ; Construction-urbanisme, 2002, comm. 76, note
Ph. Benoit-Cattin ; RDi., 2002, p. 274, obs. P.Soler-Couteaux.
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