Bibliothèque de droit de l'environnement et de l'urbanisme - L'office du juge des référés en droit de l'urbanisme - 173

L'APPRÉCIATION LIMITÉE DE LA CONDITION D'URGENCE PAR LE JUGE DES RÉFÉRÉS

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référés. Celui-ci se limite à un simple contrôle de la dénaturation des pièces du
dossier et de l'erreur de droit « manifeste ». Le juge de cassation se contentera,
pour l'essentiel, de vérifier que le juge des référés a bien pris en compte l'ensemble
des intérêts en présence, en particulier l'intérêt public.
377. Par ailleurs, la notion d'intérêt général, qui peut justifier qu'il y ait lieu
à suspendre une décision administrative, ou au contraire y faire obstacle, est une
notion éminemment évolutive. Ainsi ce qui peut être d'intérêt général à un
moment donné, peut ne plus l'être par la suite et inversement. Les décisions relatives à l'installation des antennes de téléphonie en sont un très bon exemple.
Lorsque le réseau de téléphonie mobile ne couvrait pas de manière satisfaisante
l'ensemble du territoire national, il y avait un intérêt public à ce que l'urgence soit
reconnue pour la suspension des décisions s'opposant à l'installation d'antennes
relais. Mais une fois que ce réseau était arrivé à maturité, cet intérêt général n'existait plus, ou du moins n'était plus suffisant à ce qu'il y ait urgence à obtenir la
suspension de la décision s'y opposant. On peut même imaginer que si, par la
suite, des études démontrent la nocivité des ondes radios diffusées par ce type
d'installation, un intérêt public s'attachant à la santé publique soit reconnu et
fasse obstacle à ce qu'il y ait urgence à suspendre la décision de refus de délivrer
l'autorisation sollicitée313.
378. Enfin, l'argumentation des parties joue un rôle essentiel dans l'appréciation de la condition de l'urgence dans le cadre du bilan. Le juge des référés pourra
estimer dans un cas, à l'issue du bilan, que la condition de l'urgence est satisfaite
et dans un autre juger que l'intérêt public fait obstacle à la satisfaction de cette
dernière en fonction de l'argumentation des parties. Le rôle des parties dans l'appréciation de la condition de l'urgence, en particulier lors de l'audience de référé,
apparaît comme essentiel dans l'appréciation des intérêts en présence et donc sur
l'urgence à prononcer ou non la mesure de suspension.
379. Tous ces éléments qui entrent en ligne de compte dans la mise en œuvre
du bilan de l'urgence expliquent la difficulté, voire l'impossibilité, de systématiser
la notion du bilan d'urgence en matière de référé. Celle-ci se caractérise intrinsèquement par sa « grande souplesse »314, qui apparaît comme une condition nécessaire au succès des procédures d'urgence telles qu'issues de la loi du 30 juin 2000.
B. LA MISE EN ŒUVRE DU BILAN DE L'URGENCE EN MATIÈRE
DE CONTESTATION D'UN DOCUMENT D'URBANISME
380. Un document d'urbanisme est susceptible de faire l'objet d'une mesure
de suspension dans le cadre d'un recours en référé-suspension. Pourtant, les professeurs Debouy et Périnet-Marquet constatent que si le Conseil d'État n'a
« jamais posé comme principe que la demande de suspension d'un plan local
d'urbanisme n'est jamais urgente, il faut bien admettre que dans les faits il n'admet pratiquement jamais une telle suspension »315. En effet, à l'issue du bilan de
l'urgence, le juge du référé n'accorde que très difficilement l'existence d'une
313. Sur le caractère nécessairement évolutif de la notion d'intérêt général, voir : Conseil d'État,
L'intérêt général, rapport public, 1999, La documentation française, Paris, p. 316 et s.
314. BONICHOT (J.-C. B.), observations sur CE 11 janvier 2006, Association « Défense du site
caussolois », req. no 282217, BJDU 1/2006, p. 63.
315. DEBOUY (C) et PERINET-MARQUET (H), chron., DAUH, 2005, p. 592.
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