Bibliothèque de sciences criminelles - L'habitude en droit pénal -1 - 192

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L'HABITUDE EN DROIT PÉNAL

1. La condamnation graciée
267. Prise en compte d'une condamnation graciée. Une condamnation graciée
compte pour la récidive103 car l'article 133-7 du Code pénal indique que « la grâce
emporte seulement dispense d'exécuter la peine ». Autrement dit, la grâce ne fait
pas disparaître la condamnation qui figure toujours au casier judiciaire. Elle ne
constitue donc pas une dispense de peine mais simplement une dispense d'exécuter la peine. Si la distinction est claire au plan technique, il est tout de même difficile de justifier, politiquement, la différence de traitement avec celui qui bénéficie
d'une dispense de peine. En effet, dans les deux cas, l'auteur des infractions ne
subira ni emprisonnement, ni amende, ni peine complémentaire. Autant dire que
matériellement, le dispensé de peine et le condamné gracié bénéficient de la même
clémence. Comment justifier alors que l'un puisse être récidiviste et pas l'autre ?
Si la prise en compte d'une condamnation graciée pour la récidive n'est donc pas
exempte de toute critique, la réhabilitation, elle, pose des problèmes distincts.
2. La condamnation réhabilitée
268. Prise en compte d'une condamnation réhabilitée. Traditionnellement,
la réhabilitation judiciaire avait pour effet d'effacer la peine du casier judiciaire
après exécution. Par conséquent, la condamnation n'en était plus vraiment une,
faute de peine. La jurisprudence en déduisait qu'une condamnation réhabilitée
ne pouvait pas être prise en compte pour la récidive104, ce qui semblait parfaitement logique, eu égard à la définition classique de la condamnation pénale. La loi
du 5 mars 2007105 a complètement bouleversé cette logique106. D'une part, elle a
modifié l'article 769 8o du Code de procédure pénale, qui prévoit désormais que
les condamnations ayant fait l'objet d'une réhabilitation judiciaire sont retirées
du casier judiciaire uniquement lorsque la juridiction a expressément ordonné la
suppression de la condamnation du casier judiciaire. Autrement dit, l'effacement
de la condamnation du casier judiciaire n'est plus automatique. Et d'autre part,
la loi a modifié l'alinéa 3 de l'article 133-16 du Code pénal, aux termes duquel
il est dorénavant possible de prendre en compte une condamnation réhabilitée
pour constituer le premier terme de la récidive107. La chambre criminelle veille
d'ailleurs au strict respect de cette disposition108, dont la portée est double. Non
seulement elle concerne les condamnations réhabilitées, mais elle influe également
sur les condamnations avec sursis non avenues.
casier judiciaire, elle figure toujours sur le bulletin n° 1 (CA Riom 13 mars 2003 : Juris-Data n° 2003220294). Dans la même logique, une infraction amnistiée ne peut pas être prise en compte pour constituer la récidive : infra, n° 316.
L'amnistie produit des effets comparables en droit disciplinaire de l'entreprise (J. Savatier,
Rép. trav. Dalloz, vo Droit disciplinaire, préc., n° 490) et en droit disciplinaire de la fonction publique
puisqu'il est interdit de prendre en compte des condamnations amnistiées pour justifier une aggravation de sanction (v. C. Wilson, Encyclopédie des collectivités locales, Le personnel des collectivités
locales, Chapitre 7 : l'action disciplinaire, 2010, n° 276 et s.).
103. Cass. crim. 5 juill. 1821 : Bull. crim. n° 108 ; 4 juill. 1828 : Bull. crim. n° 199.
104. Cass. crim. 7 sept. 1922 : Bull. crim. n° 307.
105. Loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
106. Cette loi a également durci les conditions dans lesquelles la réhabilitation peut être acquise
de plein droit par les récidivistes, notamment en ce que l'article 133-13 alinéa 1 du Code pénal double
les délais lorsque la personne a été condamnée pour des faits commis en état de récidive légale.
107. « La réhabilitation n'interdit pas la prise en compte de la condamnation, par les seules
autorités judiciaires, en cas de nouvelles poursuites, pour l'application des règles de récidive légale ».
108. Cass. crim. 15 sept. 2010 : inédit, pourvoi n° 10-81053.

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