Bibliothèque de sciences criminelles - L'habitude en droit pénal -1 - 54

L'HABITUDE EN DROIT PÉNAL

de répétition49. Toutefois, elle requiert pour sa constitution que la personne
commette habituellement l'infraction de vente à la sauvette. De prime abord,
cette condition ne semble pas pouvoir s'analyser comme une condition préalable
dans la mesure où la vente à la sauvette est en soi illicite50. Pourtant, une condition préalable pourrait être illicite dès lors qu'elle est accomplie par une personne
autre que l'auteur de l'infraction, comme c'est le cas pour les infractions de conséquence51. Par conséquent, l'infraction de vente à la sauvette commise habituellement est bien la condition préalable de l'infraction d'exploitation de vente à la
sauvette, qui répond à la définition de l'infraction d'occasion.
La qualification juridique du comportement répété n'est donc pas toujours
évidente, ce qui est confirmé par l'analyse des infractions visant des relations
habituelles.
49. Relations habituelles. La notion de relations habituelles apparaît dans
plusieurs infractions. D'abord, l'article 321-6 du Code pénal incrimine de manière
générale le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train
de vie ou de ne pas pouvoir justifier de l'origine d'un bien détenu, tout en étant en
relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à la commission
de crimes ou de délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement et procurant
à celles-ci un profit direct ou indirect52. Certains auteurs considèrent qu'il s'agit
d'une infraction d'habitude53. Pourtant, il semble que les relations habituelles
visées par ce texte peuvent recevoir la qualification de condition préalable car elles
ne visent pas des comportements exclusifs de l'agent, mais des agissements que
l'agent partage avec un tiers et qui sont distincts des actes incriminés, c'est-à-dire
le fait de ne pas pouvoir justifier de ses ressources ou de l'origine d'un bien54.
Malgré cette incrimination générale, plusieurs infractions prévoient des cas
particuliers de non-justification de ressources. Ainsi, est spécialement incriminé
le fait de ne pouvoir justifier des ressources correspondant à son train de vie
tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant
à la mendicité55, à la prostitution56, à des actes de terrorisme57, et depuis peu à
la vente à la sauvette58. La loi ne donne aucune définition sur la nature de ces
49. Ici aussi, l'argument selon lequel le terme « subsides » impliquerait des versements répétés ne
semble pas décisif (supra, n° 45).
50. Le fait que l'infraction d'exploitation exige une commission habituelle de l'infraction de
vente à la sauvette n'a pas pour effet de transformer celle-ci en infraction d'habitude car elle reste
consommée par le premier acte d'exploitation.
51. Y. Mayaud, Droit pénal général, op. cit., n° 199, à propos du recel : « même marquée du sceau
de l'irrégularité, elle est étrangère à ce que constitue l'infraction. Là est toute la subtilité permettant de
séparer données préalables et éléments constitutifs : seraient-elles licites, les conditions préalables, par
hypothèse, n'empruntent rien au comportement incriminé ».
52. Une circulaire du 3 févr. 2006 (2006-02/G1-03/02/2006) précise que « cet élargissement du
délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie à l'ensemble des infractions procurant un profit a pour objet de lutter plus efficacement contre l'économie souterraine. En effet, cette
infraction, jusqu'à présent limitée à huit délits spécifiques, ne permettait pas de prendre en compte
des délits très répandus ».
53. E. Dreyer, Droit pénal général, Litec, 2010, n° 620.
54. Ici, l'expression « tout en étant » n'implique pas une concomitance mais est liée au caractère
continu de la relation qui peut exister entre les deux personnes.
55. Art. 225-12-5 al. 2 C. pén.
56. Art. 225-6 3o C. pén.
57. Art. 421-2-3 C. pén.
58. Art. 225-12-8 C. pén.

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