Bibliothèque de sciences criminelles - La constitutionnalisation du droit pénal -1 - 174

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LA CONSTITUTIONNALISATION DU DROIT PÉNAL

Constitution aurait été respectée, mais la Convention européenne aurait pu l'être
aussi. Mais le Conseil constitutionnel n'a pas retenu cette option. La chambre
criminelle de la Cour de cassation s'est donc retrouvée dans une situation délicate, qu'elle a choisi de gérer en privilégiant le « dialogue des juges ». La difficulté
était moins grande pour l'Assemblée plénière puisque la loi nouvelle était déjà
« prête » et son entrée en vigueur, qui était prévue pour le 1er juin 2011, n'avait
qu'à être avancée. Plus tard, le 31 mai 2011, la chambre criminelle s'est inclinée
face aux arrêts de l'Assemblée plénière et a donné un effet immédiat au contrôle
de conventionnalité, en annulant les gardes à vue conduites dans le respect des
règles légales alors en vigueur et contraires à l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales166.
Bien que la tentative de la chambre criminelle de la Cour de cassation visant
à mettre le contrôle de conventionnalité à l'écart au profit du contrôle de constitutionnalité, et à compléter la décision du Conseil par la jurisprudence européenne,
ait été remise en cause par l'Assemblée plénière et le législateur, il n'en demeure
pas moins que ses arrêts du 19 octobre 2010 illustrent bien en quoi la question
prioritaire de constitutionnalité est susceptible de constituer un terrain propice
au renforcement du « dialogue des juges », en permettant l'harmonisation des
jurisprudences européenne et constitutionnelle.

SOUS-SECTION 2
LA CONCILIATION DES JURISPRUDENCES EUROPÉENNE
ET CONSTITUTIONNELLE

210. La décision du 30 juillet 2010 rendue sur question prioritaire de constitutionnalité portant sur le dispositif légal relatif à la garde à vue, a fait éclater au
grand jour la contradiction des jurisprudences européenne et constitutionnelle au
regard du statut du procureur de la république (A). Or, la Cour de cassation, qui
est tenue de respecter chacune de ces jurisprudences, a entrepris de les concilier (B).
A. UNE CONCILIATION DIffICILE
211. En vertu de l'article 66 de la Constitution, « Nul ne peut être arbitrairement détenu. L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure
le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». Pour le Conseil
constitutionnel, il résulte de cette disposition que toute arrestation ou détention
doit faire l'objet d'une intervention de l'autorité judiciaire chargée de contrôler
la mesure. De même, l'article 5 § 1 et 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales impose l'intervention
de l'autorité judiciaire en cas d'arrestation et de détention. Toute la difficulté
est alors de savoir ce qu'est l'autorité judiciaire, ou plus précisément, qui la
compose. Les dispositions du code de procédure pénale relatives à la garde à vue
ont toujours fait, et font encore, du procureur de la république l'autorité chargée de contrôler cette mesure privative de liberté. Or, si le Conseil constitutionnel
considère qu'il est bien un membre de l'autorité judiciaire, ce n'est pas le cas de
la Cour européenne des droits de l'homme.
166. Cass. Crim. 31/05/2011, pourvois n° 10-88809, 11-80034, 10-88293 et 11-81412, www.legifrance.gouv.fr

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