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LA CONSTITUTIONNALISATION DU DROIT PÉNAL

rapport figé de soumission et renvoyer à un mouvement, à une évolution dans le
temps. Le terme « constitutionnalisation » vient du verbe « constitutionnaliser »
qui signifie « rendre constitutionnel », c'est-à-dire rendre « conforme à la Constitution » ou « conférer valeur constitutionnelle »7. La constitutionnalisation du
droit pénal est donc le processus visant à rendre le droit pénal constitutionnel, à le
rendre conforme à la Constitution et à lui conférer valeur constitutionnelle. Elle
rend compte des liens qui unissent aujourd'hui le droit pénal et la Constitution.
Elle marque le passage d'un rapport figé de soumission à un rapport progressif
et évolutif de fusion, d'interpénétration de ces deux grands symboles du droit,
l'un connu et craint de tous, l'autre placé au sommet de notre système juridique.
fruit des enseignements de l'histoire, la constitutionnalisation du droit pénal est
née du désir d'encadrer et de limiter la puissance étatique dans un domaine particulièrement sensible pour les libertés individuelles.
3. Le désir d'encadrer et de limiter la puissance étatique ne concerne pas
son seul pouvoir de répression. La matière pénale n'est pas le seul domaine dans
lequel le pouvoir politique a vocation à s'étendre, à faire preuve d'un arbitraire
injuste et à user d'une contrainte excessive. Mais elle en est la cible privilégiée. Le
droit pénal a pour vocation première de régir les relations individuelles entre les
hommes dans ce qu'elles ont de plus simple, de plus basique, de plus naturel. Il
réduit la liberté de chacun afin de satisfaire au bonheur de tous. Cette restriction
de liberté passe par des interdits, ou la détermination des infractions, les peines
qui leur sont applicables, et les différentes mesures coercitives mises en œuvre dans
le cadre de la prévention, la poursuite et le jugement des infractions. Il est un droit
« à haut risque pour les libertés »8. Les peines, en particulier la peine d'emprisonnement, en sont le meilleur exemple, mais elles ne sont pas les seules en cause.
Le droit pénal s'abat certes sur la personne coupable, mais il se répercute aussi
sur la personne innocente à laquelle il est imposé de ne pas agir, ou au contraire
d'adopter tel ou tel comportement et sur la personne soupçonnée qui peut être
amenée à être privée de sa liberté et à subir des immixtions dans sa sphère intime.
Sans le droit pénal, la société risque de sombrer dans le chaos. Il est indispensable à la vie en communauté, afin de refréner les passions inhérentes à la nature
humaine. Mais, avec le droit pénal, c'est aussi un risque d'oppression qui pèse sur
les individus. Comme ont pu le démontrer les plus sombres événements de notre
histoire, cette branche du droit représente le meilleur outil des États dictatoriaux
et totalitaires, le premier vecteur de la suprématie de la puissance étatique au
détriment de la liberté des hommes. Le droit pénal est donc un droit de contrainte
nécessaire à tous, mais également craint de tous. De ce fait, il est demandeur de
limites et de garanties. Il apparaît, en effet, indispensable de trouver un point
d'équilibre permettant de faire du droit pénal un droit de contrainte raisonnable,
exclusif de tout arbitraire et excès. Or, ce point d'équilibre sera recherché au cours
de l'histoire à travers la limitation du pouvoir de l'État par le respect des droits et
libertés garantis par la Constitution. C'est dans la Constitution que le droit pénal
trouvera ses limites et c'est par la Constitution qu'il deviendra un droit pénal
satisfaisant, porteur d'un équilibre raisonnable entre les exigences répressives et
la préservation des libertés. Loin de s'opposer par la contradiction, le droit pénal,
droit de contrainte, et le droit constitutionnel, droit de protection, se rejoignent
7. Dictionnaire Le nouveau Littré, Garnier, 2008, « constitutionnalisation », « constitutionnel ».
8. Danièle Mayer, L'apport du droit constitutionnel au droit pénal en france, préc., page 439.

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