Bibliothèque de droits international et de l'Union européenne - Les engagements en matière de pratiques anticoncurrentielles - 138

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LES ENGAGEMENTS EN MATIÈRE DE PRATIQUES ANTICONCURRENTIELLES

plan européen, la situation est nuancée. Le Tribunal et la Cour de justice
jusqu'à présent, ne reconnaissaient pas une pleine application de l'article 6 § 1 à la
Commission. Deux raisons étaient avancées. Premièrement, la Communauté
n'a pas signé la Convention. Deuxièmement, la Commission ne serait pas un « tribunal » au sens de l'article 6 § 1. Néanmoins, le fait de ne pas être un tribunal
indépendant n'exonère pas la Commission de l'obligation de respecter les garanties affichées par l'article 6 de la Convention163. Monsieur le professeur Wouter
Wils, également conseiller auditeur dans les affaires de concurrence sur le plan
européen, relève qu'en pratique, la jurisprudence de la Cour de justice en matière
de respect des droits de la défense aboutit aux mêmes résultats164. Sur le plan français, le parallèle entre la situation procédurale devant l'Autorité et l'instruction
pénale n'a pas manqué d'être souligné. La phase d'instruction devant ladite autorité rappelle justement celle qui, en droit pénal, se déroule devant le juge d'instruction165. La Cour de cassation soumet à l'Autorité et avant elle, le Conseil de la
concurrence, au respect dudit article. C'est ce qu'il ressort notamment de son
arrêt du 9 octobre 2001 relatif au pourvoi formé par la société Unibéton166. De
manière générale, en raison de la possibilité d'aboutir au prononcé de sanctions
assimilables à des sanctions pénales, la procédure suivie devant l'autorité de la
concurrence doit respecter les droits de la défense et satisfaire aux exigences de
l'article 6 de la Convention167.
172. L'affaire OOO Neste c./Russie. Parmi la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (ci-après « CEDH »), l'affaire OOO Neste c./Russie
attire l'attention. Elle permet à la CEDH de prendre position sur les procédures de
concurrence. Dans son arrêt, OOO Neste c./Russie168 du 3  juin 2004, la
CEDH détaille, pour la première fois, les conditions auxquelles une procédure de
concurrence appartient à la « matière pénale », pour justifier le respect de l'article 6
163. V. not.  TPICE, 11  mars 1999, Aristrain c./Commission, aff.  T-156/94, Rec., p.  II-645,
paragr. 23 : « à cet égard, s'il est vrai que la Communauté n'a pas adhéré à la CEDH et qu'elle n'a, d'ailleurs, pas compétence pour ce faire en l'état actuel du droit communautaire (avis 2/94 du 28 mars 1996,
Rec. p. I-1759, point 36), il n'en demeure pas moins que, aux termes de l'article F, paragraphe 2, du traité
sur l'Union européenne, l'Union respecte les droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la CEDH et
tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, en tant que principes
généraux du droit communautaire ».
164. W. WILS  P.J., « La compatibilité des procédures communautaires en matière de concurrence avec la convention européenne des droits de l'Homme », Cah. dr. eur. n° 3-4/2006, ISSN 0007-9758,
vol. 32, p. 329-354.
165. R. POESY, Aspects procéduraux du droit français des pratiques anticoncurrentielles : étude
des rapports entre le juge judiciaire et le conseil de la concurrence, préc.
166. Com. 9 oct. 2001, Unibéton SA e.a, pourvoi n° 98-21.987.
167. R. POESY, Aspects procéduraux du droit français des pratiques anticoncurrentielles : étude
des rapports entre le juge judiciaire et le conseil de la concurrence, préc.
168. CEDH, 3  juin 2004, OOO Neste et autres c./Russie, n°  69042/01. En 1999, certaines
entreprises pétrolières avaient fait l'objet d'une enquête de la part de la Direction de l'administration
territoriale de Saint Pétersbourg et la Division régionale du Ministère de la politique de lutte contre
les monopoles (ci-après ensemble le « TU MAP »), autorité de concurrence russe. Cette dernière avait
considéré que les entreprises en cause avaient pris part à des pratiques concertées et ainsi violé certaines dispositions au droit de la concurrence applicables aux matières premières. L'autorité avait alors
exigé des entreprises, le remboursement au Trésor public des profits réalisés. Elle avait par ailleurs
informé le procureur de Saint Pétersbourg, des conclusions de son enquête, en vue d'une application
éventuelle de l'art.  178 C.  pén.  aux directeurs des entreprises en cause. Par la suite, la décision de
l'autorité a été confirmée par le Tribunal de commerce de Saint Pétersbourg, puis annulée par la cour
d'appel de ce ressort.  Toutefois, l'arrêt de la cour d'appel a été ultérieurement cassé par la Cour
commerciale fédérale russe.
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