Contextes - Les blogs juridiques et les enjeux d'une dématérialisation de la doctrine - 100

96 QUESTION DE STYLE : L'ÉCRITURE DU DROIT SUR LES BLOGS

la compétence, la confiance, le secret, la disponibilité, le courage, le désintéressement... et ce serait bien mal connaître la vie que d'ajouter à cette
liste « et les contacts virtuels via le blog ».
Pour ce qui me concerne, je tiens le blog sous mon nom, précisant ma
qualité d'avocat, ce qui me parait la moindre des choses. Nous avons
beaucoup d'échanges par les commentaires - plus de 100 000 - mais le
ton des billets est tel que personne ne demande de consultation, et aucun
contact client ne s'est jamais opéré via le blog. Le ton est le débat, bien
distinct de la défense, cette relation si spécifique entre un client et un avocat.

2. Pour dire quoi ?
Le blog ? Pour un amateur de droit, c'est un journal de bord, qui permet
de faire vivre l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l'homme. Si à l'origine La Gazette du Palais était la revue des
praticiens, il était en fait devenu très difficile de publier. Avec le blog, on
peut dire chaque jour ce que l'on pense, et rencontrer un public. Dans une
société démocratique, le débat d'idées est d'une telle importance, que c'est
presque un devoir de publier... Après, toute la question est de trouver
son juste registre. Alors, c'est une question de complémentarité : il y a des
registres différents, et rien de plus4. Il ne serait pas nécessaire de s'appesantir
si les blogs des praticiens n'étaient pas - parfois, trop souvent ? - accueillis
avec dédain5. C'est dire aussi à quel point j'ai été sensible à l'invitation faite
par les organisateurs du colloque, qui sont loin de ces analyses essoufflées.
L'enseignement fondamental, la définition d'une doctrine, la recherche
juridique... Je n'aurais pas besoin de souligner que ce sont les bases irremplaçables de la science juridique et de nos pratiques6, si lors du colloque,
un blogueur n'avait pas soutenu en toute décontraction que tout cela
ne servait à rien... Ayant suivi le parcours du doctorat puis de l'habilitation à diriger des recherches, créateur et rédacteur en chef d'une revue
trimestrielle de niveau universitaire7, je défends évidemment cette connaissance fondamentale et je souligne l'importance des analyses ajustées de
4. D. Houtcieff et F. Rolin, « Blogs juridiques contre Édition juridique traditionnelle.
Concurrence ou complémentarité ? », D., 2006, p. 596.
5. F. Rome, « Propos iconoclastes sur la bloghorrée », D. 8 février 2007, p. 361.
6. H. Kelsen, Théorie pure du droit, 1934, Ré-ed Dalloz, 1962 ; CURAPP, La doctrine
juridique, PUF, 1993 ; J. Rivero, « Apologie pour les faiseurs de système », Dalloz,
Chronique XXIII, 1951, p. 99. A. Seriaux, « La notion de doctrine juridique », Droits, 20,
1994, p. 65 ; J. Chevallier, « Doctrine juridique et science juridique », Droit et société,
50-2002, p. 103. Regards critiques : G. Vedel, « Jurisprudence et doctrine : deux discours »,
RA, 1997, n° spécial, p. 7 ; J.-D. Bredin, « Remarques sur la doctrine », Mélanges Hébraud,
Dalloz, 1981, p. 111.
7. Droit, déontologie et soin, Revue trimestrielle, ELSEVIER-MASSON, 600 p. par an.
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