Contextes - Penser l'ordre juridique médiéval et moderne - 155

COMPRENDRE LE FAIT COUTUMIER

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de la désuétude ou de l'évolution de la coutume pouvait être rapportée.
Surtout, la transformation sensible de la société au xvie siècle accusa assez
vite les imperfections des textes promulgués d'où une seconde phase, celle
de la réformation, où est intervenue une nouvelle rédaction de certaines
coutumes parmi les principales (coutumes de Bourgogne en 1575, de Paris
en 1580, d'Orléans en 1583).
Cependant, si l'historiographie a été longtemps fondée surtout sur ces
coutumes, leur histoire est apparue beaucoup plus complexe dès que, au
xxe siècle, les recherches ont porté de manière significative sur la pratique
dans son sens le plus large, c'est-à-dire à la fois pratique notariale et
pratique judiciaire. La comparaison avec la vie pratique à travers les actes
notariés et les usages qu'ils révèlent a fait apparaître des divergences avec
les coutumes rédigées ; or, ces usages divergents n'en constituaient pas
moins manifestement des éléments d'un droit coutumier puisqu'ils étaient
reconnus comme tels par la jurisprudence des juges locaux. Aussi bien d'ailleurs ces coutumes régionales ne donnaient du droit qu'une vue partielle,
ce qui précisément laissait à la charge de la pratique juridique un domaine
important de besoins à couvrir dans la vie de la société.
Des doutes apparaissent alors sur la portée que ces coutumes régionales auraient pu avoir réellement dans la vie du droit. Déjà vers la fin du
Moyen Âge y avait-il une imprécision car on avait tendance à considérer la
coutume du chef-lieu comme la coutume du pays. De plus, si la rédaction
des coutumes entendait promulguer un droit applicable à l'ensemble de
la population du pays concerné, à cette époque également l'expression de
la coutume était devenue assez rapidement dominée par l'influence de la
population urbaine et de la noblesse avec d'ailleurs les oppositions d'intérêts
entre les deux groupes. De même encore, à côté de commissaires romanisants, à l'occasion était-il fait appel à des coutumiers, juristes locaux qui en
fait représentaient d'abord les intérêts de leurs pays ou de leurs villes ; ainsi
peut-on rappeler un conflit entre Angers et Saumur à propos de la réformation de la coutume d'Anjou. Chopin en effet citait en particulier un article
de la coutume dont les juristes de Saumur demandaient la réformation parce
qu'il paraissait interdire la communauté continuée usage très pratiqué dans le
pays, mais les juristes d'Angers s'opposaient à toute réforme de la coutume
et pour cette raison la proposition de Chopin ne put aboutir4.
En même temps, d'une manière générale, la vie des ruraux qui représentaient cependant en nombre la plus grande partie de la population n'y
apparaissait pas. Il est remarquable d'ailleurs qu'il en était de même dans
4. X. Martin, « Détroit et districtio. L'antagonisme Angers-Saumur sur le fait de la
coutume d'Anjou », Mémoires de la Société pour l'histoire du droit des anciens pays bourguignons, t. 40, 1983, p. 127-151.

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