Grands Colloques - La protection du dirigeant social - 170

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Le CuMuL Du CoNtrAt De trAVAIL

Il est loisible de se demander, à la suite de stimulantes propositions doctrinales, si la Cour de cassation ne serait pas bien inspirée d'étendre le champ
de ces incompatibilités de principe ou, à tout le moins, de manifester sa forte
réticence face à d'autres cumuls. Comme l'a souligné François Collin29,
l'étendue des pouvoirs et l'autonomie de certains dirigeants sont « telles
qu'il est impossible de concevoir qu'un contrôle puisse s'exercer sur des
fonctions techniques même détachables du mandat » : n'est-ce pas le cas du
directeur général de la SA, étant précisé que l'on peut douter que le conseil
d'administration ait réellement vocation à exercer un contrôle sur d'éventuelles fonctions salariées, ou du président de la SAS ? on peut ne pas être
convaincu par les arrêts, certes relativement anciens, ayant fondé l'existence
d'un lien de subordination juridique sur la constatation que le président du
conseil d'administration avait demandé l'accord de l'un des actionnaires
importants sur un problème de gestion du personnel30 ou qu'un président de
conseil d'administration était tenu de consulter le conseil d'administration,
non seulement pour toute opération importante mais également sur les
dispositions à prendre et les moyens à mettre en œuvre pour assurer l'exécution des commandes reçues et sur les discussions et les décisions relatives
à tous traités, marchés ou conventions31 : la prestation de travail est-elle
véritablement contrôlée et possiblement sanctionnée dans de tels cas ?
Le législateur, quant à lui, admet expressément la compatibilité entre un
contrat de travail et certains mandats sociaux. L'article L. 225-22 du Code
de commerce admet ainsi, sous certaines conditions, qu'un salarié puisse
être nommé administrateur au sein d'une société anonyme (le mouvement
inverse étant, en principe, interdit ; v. supra). La coexistence d'un contrat de
travail et de ce mandat social s'expliquerait par le fait que leurs fonctions
sont « à la fois collégiales et intermittentes, les tribunaux acceptant volontiers
le cumul, alors qu'ils sont beaucoup plus restrictifs à l'égard des directeurs
généraux »32. L'article L. 225-61, alinéa 2 suggère, par une interprétation a
contrario, que toute personne peut être nommée membre du directoire alors
qu'elle est déjà salariée, ou devenir salariée alors qu'elle est déjà membre du
directoire. Il en va encore de même des membres du conseil de surveillance,
puisque, comme cela a déjà été dit, l'article L. 225-85 du Code de commerce
admet qu'ils puissent recevoir de la société une rémunération due « au titre
d'un contrat de travail correspondant à un emploi effectif », dès lors que le
nombre de membres du conseil de surveillance ne dépasse pas le tiers des
membres en fonction.

29. Art. préc., spéc. n° 11.
30. Cass. soc., 25 févr. 1988, n° 86-44.848, Bull. civ. V, n° 137.
31. Cass. soc., 6 nov. 1991, n° 90-41.183, RJS 12/1991, n° 1377.
32. M. Cozian, A. Viandier et F. Deboissy, op. cit., n° 557, p. 305.

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