Systèmes - La Cour de justice de l’Union européenne - 1re - 26

La Cour de justice de l'Union européenne

L'indépendance s'appréhende collectivement et renvoie alors à
son autonomie institutionnelle, ou fonctionnelle45. Une institution
autonome est une institution capable d'échapper aux pressions
éventuelles des autres institutions, sans pour autant la soustraire
totalement à « toute contrainte politique ou autres mécanismes de
responsabilité »46 et sans la confiner dans une forme d'isolement. À
cet égard, les dispositions du TUE et du TFUE, qui portent sur l'architecture, les missions, les voies de droit, ainsi que sur la désignation et le statut des membres, sont modifiables par les seuls États à
l'unanimité et suivant les règles de modification du traité prévues à
l'article 48 TUE. La CJUE n'a pas la maîtrise de ces aspects qui la
concerne et est donc peu autonome, à cet égard. Néanmoins, elle
est également protégée « contre d'éventuelles pressions des pouvoirs législatif et exécutif »47. Quant au protocole (nº 3) sur le statut
de la CJUE, qui comporte des dispositions sur l'organisation et la
procédure (comme la représentation des parties ou les phases de
la procédure) de la Cour et du Tribunal et sur la répartition des compétences entre les deux juridictions, il peut être modifié par le
Conseil et le Parlement européen en codécision, sur initiative de la
Cour de justice ou de la Commission (à l'exception du titre 1 et de
l'article 64 qui ne peuvent être modifiés qu'en suivant la procédure
de révision des traités, comme le prévoit l'article 281 TFUE). Bien
que la Cour de justice dispose d'un monopole d'initiative de fait,
seuls le Conseil et le Parlement peuvent décider de ces questions.
L'ensemble fait ressortir une potentielle emprise politique sur la
CJUE d'autant que la Commission pourrait à tout moment en toute
légalité utiliser son pouvoir d'initiative. Quant au règlement de procédure, qui complète les règles de procédure non précisées dans le
statut, il est désormais48 adopté par la Cour après approbation du
Conseil. Le règlement de procédure du Tribunal est adopté par ce
dernier avec l'accord de la Cour de justice puis du Conseil (art. 353
et 354 TFUE). Là encore, le poids du Conseil et même de la Commission, consultée de manière informelle, est important. Ainsi, le degré
d'« autonomie fonctionnelle »49 de la CJUE semble a priori
45. V. infra, partie II, chap. 1, « L'autonomie de la CJUE », p. 87.
46. M. SHAPIRO, Courts. A comparative and political analysis, University Chicago Press, 1981,
p. 34.
47. J.-P. KEPPENNE, « Les procédures de révision du cadre réglementaire des juridictions de
l'Union », CDE 2017, nº 2, p. 343, 351.
48. V. égal. partie II, chap. 1, « L'autonomie de la CJUE », p. 96.
49. M. EUDES, « La légitimité du juge de la Cour européenne des droits de l'homme - Observations sur la représentativité et l'indépendance du juge de Strasbourg », RQDI 2000, 1,
p. 131, 153.

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