Les Mélanges - Mélanges en l'honneur du professeur Didier R. Martin - 239

HERVÉ CROZE

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l'efficacité comparée des deux méthodes, seulement de leurs qualités littéraires
respectives : l'expérience tend à montrer qu'il est difficile de soutenir le style sur
la longueur et que la brièveté, fruit d'un long travail de préparation, est souvent
plus claire.
17. On ne peut se demander ce que deviendra le style doctrinal sans évoquer
l'avenir de la doctrine, et donc celui de l'édition juridique.
Cette dernière est bouleversée par la dématérialisation et la diffusion instantanée par internet. La demande solvable - celle des professionnels du droit71 -
porte sur une information directement opérationnelle, c'est-à-dire technique et à
jour en permanence. Sur ce dernier point le tourbillon législatif et réglementaire
ne facilite pas les choses, pas plus que la diffusion généralisée des décisions de
justice sans filtre éditorial préalable. L'édition juridique ne peut répondre à cette
demande - à grand-peine - qu'en modifiant profondément la structure de ses
produits : non seulement la production papier devient dépendante de la production dématérialisée (car sa lenteur de diffusion la disqualifie à terme), mais encore
les messages juridiques sont pulvérisés en atomes d'information (un article, un
arrêt, un commentaire...) constitués en bases de données72, ce qui condamne la
monographie ou la cantonne à un exercice académique.
Ce n'est pas à dire que l'opinion doctrinale est condamnée ; elle est même très
demandée, les praticiens déplorant seulement l'absence de réactivité immédiate
sur des textes ou des décisions de jurisprudence dont ils ne peuvent eux-mêmes
différer la mise en œuvre. À supposer que la doctrine entre dans ce jeu (a-t-elle
vraiment le choix ?), elle devra adapter son style d'écriture, et c'est là un bien
grand défi, et beaucoup reste à inventer.
18. À la bonne et belle doctrine il restera au moins la postérité. Concluons,
avec Buffon, que « les ouvrages bien écrits seront les seuls qui passeront à la postérité : la quantité des connaissances, la singularité des faits, la nouveauté même
des découvertes, ne sont pas de sûrs garants de l'immortalité... Le style ne peut
donc ni s'enlever, ni se transporter, ni s'altérer : s'il est élevé, noble, sublime, l'auteur sera également admiré dans tous les temps ; car il n'y a que la vérité qui soit
durable, et même éternelle ».

71. D'un point de vue purement marketing (désolé...) les étudiants forment une autre
demande solvable qui attend une autre forme d'édition juridique que nous n'examinerons pas ici.
72. Qui, dans une perspective doctrinale classique, peuvent être vues comme étant déstructurées, en tout cas qui ne se prêtent pas (ou mal) à une structure arborescence comme le
plan en deux parties et deux sous-parties.

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