Grands Colloques - La crise des institutions - 74

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LE JUGE ET LA CRISE DES INSTITUTIONS

Pour surmonter cette première difficulté, il faut mentionner les apports
de deux groupes de travail qui ont formulé des propositions destinées à
accroître l'indépendance du juge. D'abord, le groupe Terra Nova a remis
en 2011 un rapport intitulé « La justice, un pouvoir de la démocratie »52.
Ce groupe était présidé par M. le professeur Dominique Rousseau et
M. le conseiller Daniel Ludet. Le rapport Terra Nova a suggéré, non pas de
supprimer le ministère de la justice - ce qui pouvait aussi être envisagé -,
mais de lui retirer la gestion de la carrière des magistrats53. Cette gestion
ne reviendrait pas au CSM, tel qu'il existe aujourd'hui, mais à un Conseil
supérieur de la justice (CSJ). Il s'agirait d'une « institution indépendante» qui
ne comprendrait aucun membre nommé par le pouvoir exécutif. Le conseil
aurait un rôle essentiel : « Tous les magistrats seraient nommés sur proposition du CSJ ». S'agissant du parquet, le rapport Terra Nova a proposé la
création d'un « procureur général de la République »54 qui dirigerait l'action
publique. Ainsi, sans disparaître, le ministère de la justice aurait un rôle
bien plus modeste qu'aujourd'hui. Ensuite, le Club des juristes a constitué
une commission, présidée par M. le professeur Loïc Cadiet, dont le rapport
« Pour une administration au service de la justice » a été rendu public en
201255. Il a été proposé de transformer le CSM, qui deviendrait un Conseil
supérieur de la justice56. Ce conseil pourrait alors s'occuper de la gestion
de la carrière des magistrats et la DSJ serait placée sous son autorité. Le
groupe de travail a également envisagé de confier cette mission à la Cour
de cassation, à l'image de ce qui existe dans l'ordre administratif (gestion
intégrée), mais il a finalement renoncé à cette voie. Il a aussi proposé de
maintenir le rattachement du ministère public au ministère de la justice,
mais de donner aux magistrats du parquet de nouvelles garanties et de leur
conférer une certaine autonomie57. Pour l'instant, ces différentes propositions n'ont pas été adoptées, mais elles ont permis d'alimenter le débat.
Il est très vraisemblable que certaines d'entre elles seront reprises dans les
prochaines années.

« Pour un renforcement du rôle du Conseil supérieur de la magistrature dans la gestion de
la carrière des magistrats », JCP G 2015, 281.
52. D. Ludet et D. Rousseau, La justice, un pouvoir de la démocratie, rapport préc.
53. Rapp. préc., p. 28 et s.
54. Rapp. préc., p. 37 et s.
55. L. Cadiet (dir.), Pour une administration au service de la justice, préc. Pour une présentation du rapport : L. Raschel, « Pour une administration de la justice plus indépendante
et démocratique. - À propos du rapport de la commission "Gouvernance de la justice" du
Club des juristes », JCP G 2012, 885, adde « Administration de la justice : la réforme est en
marche ! », Procédures 2012, alerte 37.
56. Rapp. préc., n° 41 et s., spéc. 43-44.
57. Ibid.
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