Grands Colloques - La crise des institutions - 8

AVANT-PROPOS

Pour être convenablement traitées, ces interrogations devaient être
envisagées dans les matières qui relèvent du droit privé comme du droit
public. S'intéresser à la crise des institutions suppose en effet d'interroger notre manière contemporaine de faire et de penser le droit, au-delà
des frontières balisées - et relatives - des droits privé et public. Le sujet
imposait ainsi une approche transversale. Mais comment lier ces problématiques si variées, dont le risque était qu'elles se succèdent sans jamais
se rencontrer ? En vérité, afin d'apprécier si l'on peut relier ces « crises »
et s'il existe un fil conducteur, on peut poser deux questions essentielles :
il faut déjà se demander pourquoi la crise se répand dans les institutions,
quelles en sont les causes, pour, ensuite, être en mesure de s'interroger sur
les réponses qui pourraient lui être apportées.
Les causes de la crise sont variables. S'agit-il d'une crise d'efficacité,
d'une crise de légitimité, d'une crise des discours ? L'échec de certaines
politiques économiques et sociales, comme le montre le cas du chômage,
ou l'impuissance de l'État dans un contexte de gouvernance mondialisée
tendraient à faire penser à une crise d'efficacité. La perte de confiance des
citoyens envers le personnel politique, la contestation plus générale de
l'autorité conduisent à discerner également une crise de légitimité, une crise
d'autorité, une crise de confiance, une crise des représentations... Derrière
ces différentes formes de remise en cause, se cache d'ailleurs peut-être
un mal plus profond : une crise de la société, une crise de l'homme, pour
reprendre la formule d'Albert Camus. Le juriste, en particulier, doit se
demander si la crise tient davantage à l'institution elle-même ou à des
pratiques, des comportements. La crise des institutions trouve parfois ses
racines en dehors des règles qui les façonnent, ce qui en rend l'appréhension
plus délicate.
La recherche des causes de la crise détermine la réflexion sur la seconde
question retenue pour ce colloque, celle des réponses à la crise. Le projet
est ambitieux, sans doute. Il pourrait même paraître utopique : le droit
peut-il sérieusement offrir une réponse à la crise des institutions alors qu'il
est lui-même en crise ? Le remède ne serait qu'un poison, dont il faudrait
absolument se détourner. Il faut toutefois sortir de ce paradoxe. En vérité,
si le droit n'est pas la panacée, on voit cependant mal comment améliorer
les institutions sans toucher au droit lui-même. Le droit peut donc fournir
une réponse à la crise des institutions, aussi modeste soit-elle. Ces réponses
peuvent cependant prendre de multiples formes. Faut-il changer les textes
pour résoudre la crise ? Faut-il introduire de nouvelles institutions, de
nouveaux acteurs, pour prendre le relais d'institutions épuisées ? Dans le
prolongement, faut-il instaurer une VIe République, la mère de toutes les

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