Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 28

LE TEMPS DE LA LOI

de nuit s'explique par les exigences des usines à feu continu et il ne semble
pas qu'il y ait eu d'abus avéré. De même, le travail le dimanche et les jours
fériés est interdit aux enfants de moins de seize ans (tous ceux protégés par
la loi)25. Il apparaît que cette règle est bafouée dans certaines industries,
notamment les usines métallurgiques, les tuileries, les sucreries et les
verreries, c'est-à-dire toutes les usines où les procédés de fabrication
excluent une suspension du travail26. Une autre disposition n'est pas
observée, c'est l'article 5 suivant lequel tout enfant de moins de douze ans
doit fréquenter une école. Lorsqu'il a atteint cet âge il peut se dispenser de
cette obligation, à la condition que ses parents puissent exhiber un certificat,
délivré par le maire de la commune dans laquelle ils sont domiciliés,
attestant qu'il a reçu une instruction primaire élémentaire27. Le 25 avril 1886,
une lettre du ministre de l'Agriculture au préfet de la Côte-d'Or fait état
de manquements à cette disposition : « Monsieur le préfet, dans le rapport
annuel que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser concernant l'exécution
de la loi sur le travail des enfants, vous faites connaître qu'en ce qui touche
l'instruction la situation laisse encore à désirer principalement dans le
Châtillonnais et que cette circonstance tient à ce que les parents attachent
peu d'importance à l'éducation »28. Ce n'est pas la première fois que le haut
fonctionnaire se fait tancer à ce sujet : une lettre du 13 juin de l'année
précédente l'avait déjà appelé à prendre les mesures adéquates pour faire
cesser cette violation de la loi, rappelant que les responsables de ce devoir
la conséquence du chômage d'un moteur hydraulique ou des réparations urgentes l'exigent,
les enfants au-dessus de treize ans pourront travailler la nuit, en comptant deux heures pour
trois, entre neuf heures du soir et cinq heures du matin. Un travail de nuit des enfants ayant
plus de treize ans, pareillement supputé, sera toléré, s'il est reconnu indispensable, dans les
établissements à feu continu dont la marche ne peut pas être suspendue pendant le cours
des vingt-quatre heures ».
25. Article 4 : « Les enfants au-dessous de seize ans ne pourront être employés les
dimanches et jours de fêtes reconnus par la loi ».
26. Voir lettre du sous-préfet de Châtillon-sur-Seine, op. cit. ; lettre du sous-préfet de
Beaune, secrétariat, loi du 22 mars 1841, travail des enfants dans les manufactures au préfet
de Côte-d'Or, le 28 juin 1867 ; minute, préfecture de la Côte-d'Or, réponse au questionnaire, le 30 septembre 1867, ADCO, 10 M 12 Travail des enfants ; lettre du préfet de la
Côte-d'Or, secrétariat, régime industriel, loi du 22 mars 1841 au ministre de l'Agriculture,
du Commerce, le 23 mars 1866.
27. Article 5 : « Nul enfant âgé de moins de douze ans ne pourra être admis qu'autant que
ses parents ou tuteur justifieront qu'il fréquente actuellement une des écoles publiques
ou privées existant dans la localité. Tout enfant admis devra, jusqu'à l'âge de douze ans,
suivre une école. Les enfants âgés de plus de douze ans seront dispensés de suivre une
école, lorsqu'un certificat, donné par le maire de leur résidence, attestera qu'ils ont reçu
l'instruction primaire élémentaire ».
28. Lettre du ministère de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, direction
du commerce intérieur, bureau de l'industrie au préfet de la Côte-d'Or, le 25 avril 1866,
ADCO, 10 M 12 Travail des enfants.

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