Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 73

UNE RÉFORME ORIGINALE

caractère obligatoire des procédures de conciliation et d'arbitrage ; d'autre
part la légitimité du recours à la grève, sauf indemnisation possible des
employeurs en cas de fautes des ouvriers. « Qu'est-ce à dire sinon que la
partie qui déclenche une grève ou un lock-out sans recourir aux procédures de conciliation et d'arbitrage contrevient aux obligations mises à sa
charge par la loi et commet une faute sanctionnée par les articles 1382 et
suivants du Code civil. Les procédures de conciliation et d'arbitrage n'en
ont pas moins été mises en mouvement. La loi, en rendant obligatoire
la conciliation et l'arbitrage, n'a pu vouloir les interdire précisément au
moment où les conflits ont le caractère le plus aigu ou, suivant la formule
imagée d'un membre du Conseil d'État, « n'a pu décider que les pompiers
ne pouvaient intervenir qu'en cas de menace d'incendie, mais devaient
abandonner l'immeuble en feu lorsque l'incendie a éclaté »32. La Cour
rejette le pourvoi de l'employeur, le sieur Costa, et confirme la validité de
la sentence surarbitrale ordonnant la réintégration des ouvriers licenciés33.
Pour compléter les quelques remarques relatives à la compétence des
arbitres, il convient d'ajouter que la loi du 4 mars 1938, article 9 notamment,
a interdit aux arbitres de statuer « sur d'autres objets que ceux déterminés par
le procès-verbal de non-conciliation, ou ceux qui, résultant d'événements
postérieurs à ce procès-verbal, sont la conséquence du conflit en cours ».
Aucun différend ne peut être soumis à l'arbitrage sans avoir fait l'objet d'une
tentative de conciliation préalable. Il découle de cette idée que les arbitres
sont désignés pour trancher un différend dans un établissement précis et que
les mêmes arbitres ne sont pas compétents pour statuer à l'égard d'autres
entreprises dans lesquelles une grève de solidarité aurait éclaté34.
Si les lois de 1936-1937 présentent bien des lacunes qui ont obscurci
le champ d'application de la législation nouvelle et les compétences des
arbitres, elles n'ont pas été beaucoup plus précises quand il s'était agi de
définir les pouvoirs des arbitres. Sur ce point encore, la loi du 4 mars 1938
a permis de mieux encadrer le pouvoir des arbitres.

B. Les pouvoirs des arbitres mieux encadrés
La loi du 31 décembre 1936 confère aux arbitres les pouvoirs d'amiables
compositeurs pour « établir un règlement équitable des conditions de
travail » sous la seule condition d'observer « droit de propriété, droit
32. Conclusions Tissier, Dr. soc., op. cit., p. 250.
33. Nous nous sommes permis de développer ce point. En effet, la coexistence de deux
grands principes, l'obligation des procédures de conciliation et d'arbitrage d'un côté, la
légalité du droit de grève de l'autre était extrêmement difficile à préciser. Les ouvriers ne
pouvaient accepter les procédures pacifiques obligatoires que si elles ne leur interdisaient
pas la grève.
34. 26 août 1938, n° 464.

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