Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 80

LE TEMPS DE LA LOI

premier cadre institutionnel des conventions collectives qui précise que
leurs clauses sont prioritaires face à celles du contrat de travail ; elle constitue
alors une étape décisive dans la construction du droit de la négociation
collective. La loi du 24 juin 1936 introduit la possibilité d'extension d'une
convention collective à l'ensemble de la profession dès lors qu'elle est signée
par les syndicats les plus représentatifs. Elle instaure également l'important
principe de faveur selon lequel la convention collective peut prévoir des
normes plus favorables aux salariés que la loi. La réforme de 1968 confère
aux syndicats représentatifs le monopole de la négociation. En 1982, le
législateur renforce la place des représentants du personnel dans l'entreprise
avec le développement du droit négocié et l'obligation annuelle de négocier
sur les salaires dans l'entreprise. En 2007, pour faire suite au rapport du
Conseil économique et social intitulé Consolider le dialogue social, une
procédure de dialogue social est mise en place. En 2008, la loi modifie en
profondeur la représentativité des syndicats dans l'entreprise, sachant que
seuls les syndicats représentatifs peuvent dialoguer.
Le dialogue social est reconnu par la Constitution. L'article 1er de la
Constitution de 1958 peut en effet être considéré comme le socle de la
démocratie sociale en tant qu'il proclame que la France est une République
sociale ; l'alinéa 8 du préambule de la Constitution de 1946 affirme quant
à lui que « tout travailleur participe par l'intermédiaire de ses délégués à la
détermination collective des conditions de travail ». Le Conseil constitutionnel a affirmé la valeur constitutionnelle de ce principe3 et l'a même
reconnu comme un droit ou une liberté constitutionnellement garanti4.
Ceci étant, le dialogue social n'est pas encore un droit constitutionnel ; le
projet, engagé devant l'assemblée nationale en 2013, s'est en effet arrêté
avant même toute forme de discussion5.
Le dialogue social existe également à l'échelle européenne. Il est né avec
le traité de Rome et a pris son essor dans les années 1980. L'instauration
des comités d'entreprise européens6 a manifestement influé sur le développement d'un dialogue social transnational. Même si les mille comités
actuellement recensés restent cantonnés à produire du consensus au
sommet sans avoir de réel impact sur les conditions de travail, ils sont des
instances de facilitation, des lieux où l'on essaie de trouver des solutions
pays par pays7.
3. Décision n° 77-83 DC du 20 juillet 1977.
4. Décision n° 2010-42 QPC du 7 octobre 2010.
5. Pour une analyse, voir Cassard-VaLembois A.-L., Heurts et malheurs du projet de
constitutionnalisation de la démocratie sociale, colloque Innovations et défis de la démocratie
sociale, Dijon, 16 et 17 avril 2015.
6. Directive 94/95/CE du 22 septembre 1994 révisée par la directive 2009/38/CE du
6 mai 2009.
7. « Le CE européen, facilitateur de dialogue ? », SSL 2015, n° 1675, p. 2.

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