Contextes - La réception du droit du travail par les milieux professionnels et intellectuels - 99

NAISSANCE DE LA LÉGISLATION OUVRIèRE RÉPUBLICAINE

par l'adoption de la loi du 9 avril 1898 relative aux nouvelles modalités
de réparation des accidents du travail, donne lieu, devant la cour d'appel
de Bordeaux, à une vaste synthèse intitulée Étude sur les principes de la
législation du travail ainsi qu'à une intervention plus spécifique, à Nancy,
portant sur La réparation des accidents de travail d'après le Code civil
et d'après la loi du 9 avril 189822. L'année 1900 clôt cette décennie avec
un discours en forme de bilan prononcé devant la Cour de cassation par
l'avocat général Duboin qui choisit de s'exprimer sur La législation sociale
à la fin du xixe siècle23. Reconnu pour son expertise sur ces questions, il est
d'ailleurs nommé, l'année suivante, au sein de la commission de codification
des lois ouvrières24.
De ces huit discours prononcés en l'espace de dix ans, deux d'entre eux
retiendront plus particulièrement l'attention de l'auteur du premier grand
traité de législation industrielle, pionnier de cet enseignement universitaire,
le juriste lyonnais Paul Pic : ceux prononcés devant la Cour de cassation
par les avocats généraux Sarrut et Duboin qui ont en commun à la fois de
s'interroger sur la genèse de la législation ouvrière et d'en établir un bilan
d'ensemble. C'est à ce titre que Paul Pic, dans les différentes éditions de
son ouvrage de référence, renvoie expressément à ces deux interventions,
tant pour éclairer la fécondité de l'œuvre accomplie par la IIIe République
par rapport aux régimes précédents que pour suggérer l'existence d'un
lien quasi organique entre République et législation ouvrière25. Dans un
contexte où, depuis le dernier quart du xixe siècle, les commentaires de
l'actualité législative occupent une place décisive au sein des discours de
rentrée26, les questions relatives à la réglementation du travail se hissent
naturellement au premier rang des thèmes abordés et suscitent un intérêt
à la hauteur de la production législative qu'elles provoquent.

moyens de le prévenir », discours prononcé par le procureur général Fachot, 16 octobre 1894,
cour d'appel d'Orléans.
22. Discours prononcé le 17 octobre 1898 par M. Henry Cardot, substitut du procureur
général, cour d'appel de Nancy : « De la réparation des accidents de travail d'après le Code
civil et d'après la loi du 9 avril 1898 ».
23. Discours prononcé par l'avocat général Duboin : « La législation sociale à la fin du
xixe siècle », Cour de cassation, audience de rentrée, La France judiciaire, 27 oct. 1900,
p. 305-320.
24. Arrêté du 27 novembre 1901.
25. En ce sens, par exemple, PiC P., Traité général théorique et pratique de droit commercial, op. cit., 1922, 5e éd., p. 75. Également : bry G, Cours élémentaire de législation industrielle, Sirey, 1909, 4e éd., p. 27. Le discours prononcé par l'avocat général Sarrut en 1894
est cité pour illustrer les progrès de la législation au même titre que l'Histoire des classes
ouvrières d'Émile Levasseur.
26. FarCy J.-C., Magistrats en majesté [...], op. cit., p. 358. En ce sens, également :
Cosson e., « Analyse des discours prononcés en 1884 aux audiences solennelles de rentrée
de la Cour de cassation et des cours d'appel », La France judiciaire, 1884-1885, p. 369-421.

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