Systèmes - Lobbying et stratégies d'influences en France - 1re - 75

La professionnalisation inaboutie du lobbying

transnationalisation des régulations politiques a aiguisé encore
davantage leur intérêt pour l'amélioration de la qualité des services
de lobbying dans la technicité desquels ils se sont mis à investir.
Cette quête de l'efficacité est au principe de la spécialisation d'un
métier dont elle favorise la rationalisation des méthodes - définition
des objectifs, identification des cibles, cartographie et caractérisation
des parties prenantes15, état de la question, programmation des
actions, évaluation des résultats, etc. -, des outils - intelligence
économique, veille juridique, technologique, médiatique, surveillance
des agendas institutionnels, etc. - et de ses stratégies - réactives ou
proactives16. Elle engendre aussi des luttes de définition des bonnes
pratiques qui traversent le groupe en opposant ceux qui l'exercent
dans des organisations dont les cultures divergent - entreprises
traditionnellement acquises au lobbying, syndicats, associations
citoyennes acquis au militantisme et à l'action collective. Cet
investissement dans la technicité des spécialistes de l'influence qui se
manifeste par la publication de nombreux guides17, manuels18 et livres
de témoignages19, contribue ainsi à la différenciation de la profession
de lobbyiste20 qui s'organise au sein d'associations représentatives
et s'efforcent d'en justifier l'existence et de la rendre aussi légitime
que respectable (I). Sa différenciation s'accompagne de celle de
formations universitaires dédiées à l'apprentissage de ses rudiments
qui tout à la fois déterminent les savoirs et les savoir-faire requis par
son exercice et tendent à le réserver à ceux qui les ont acquis (II). La
construction de cette profession, qui n'en est toujours qu'à ses
balbutiements, n'en a pour l'instant ni unifié les voies d'accès, ni les
pratiques, ni les conditions d'exercice, ce qui fait des lobbyistes dont
les métiers différent21 et dont la légitimité est toujours très contestée,
un groupe à l'identité est fragile (III).

15. Pour une classification journalistique des disponibilités à être influencés des députés,
classés en sept familles : H. CONSTANTY, V. NOUZILLE, Députés sous influences. Le vrai pouvoir
des lobbies à l'Assemblée nationale, Fayard, 2006.
16. P. ROMAGNI, La communication d'influence. Pour une pratique appropriée du lobbying dans
l'entreprise, Paris, Les Presses du management, 1995 ; P. BARDON, Th. LIBAERT, Le lobbying,
Dunod, 2012.
17. P. ROMAGNI, Le lobbying, mode d'emploi à l'usage de toutes les entreprises pour savoir faire
pression au bon endroit au bon moment, Les Presses du Management, 1993.
18. M. CLAMEN, Le lobbying et ses secrets. Guide des techniques d'influence, Dunod, 1995.
19. B. LE GRELLE, op. cit.
20. E. GROSSMAN, S. SAURUGGER, « Les groupes d'intérêt français : entre exception française,
l'Europe et le monde », RIPC, nº 4, 2004, pp. 507-529.
21. L. LIMOUSIN, Les métiers du lobbying et des affaires publiques, Ellipses, 2007.

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