Grands Colloques - Le régime représentatif à l'épreuve de la justice constitutionnelle - 142

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MÉPRISES ET ILLUSIONS D'UNE MÉTAPHORE

Le contrôle de constitutionnalité ne consiste pas de manière générale
en un travail mécanique de comparaison de la loi ordinaire avec le texte
constitutionnel. L'interprétation constitutionnelle est un acte créateur de
volonté et pas de simple connaissance, si l'on veut utiliser une dichotomie
trop simpliste pour rendre compte de la réalité. Une volonté ne s'exerce pas
dans un vide pneumatique, sans contraintes (je vais y revenir), de même qu'il
n'y a pas de connaissance pure, sans volonté de savoir, avec tout ce que ceci
implique de biais et d'idéologies. De toute manière, le droit n'est pas une
science naturelle dépourvue de jugement de valeurs. On peut laisser cette
croyance religieuse aux fans de la doctrine pure du droit qui imaginent de
ne pas en avoir dans leur description du droit. Il faudrait savoir pour quelle
raison ils seraient supérieurs aux juges et d'où viendrait cette hiérarchie des
êtres, dont les textes gnostiques ne nous disent rien.
Mais pourquoi assigner à un organe qui n'est pas élu et responsable devant
le corps électoral une fonction de colégislateur et parfois de pouvoir constituant - étant donné que toute Constitution, comme je viens de le dire, est un
contrat qui ne saurait être exhaustif et que l'interprétation constitutionnelle
remplit parfois les vides ou les ambiguïtés de ce contrat ?
Une réponse développée demanderait une enquête d'une autre ampleur26
et j'ai déjà soulevé beaucoup trop de questions pour que je puisse me lancer
ici dans une dans une telle entreprise.
Je puis néanmoins esquisser ma réponse tout au moins de manière suffisamment claire dans son épure, de quoi susciter la controverse.
À mon avis l'État de droit constitutionnel est la forme contemporaine
du gouvernement limité et mixte dans une « société sans qualités »27, qui
est en outre un État de partis (Parteienstaat). Ceci demande quelques
éclaircissements.
Le gouvernement représentatif est né comme une forme de gouvernement limité, par opposition au pouvoir légal quasiment sans borne de la
monarchie. Le mécanisme de limitation était, nous dit-on, sur la base d'une
lecture rapide de Montesquieu, celui d'une bonne séparation des pouvoirs.
En réalité, il s'agissait de la distribution du pouvoir législatif souverain entre
voir la sentenza N° 7/1996, http://www.cortecostituzionale.it/actionSchedaPronuncia.
do?anno=1996&numero=007.
26. Pour des éléments de cette réponse, je renvoie à mon article : A Political Theory
of Constitutional Democracy, http://www.nyustraus.org/pubs/1213/documents/
WP4Pasquino.pdf.
27. Par cette expression, j'entends une société où s'est imposée la croyance que les
citoyens ont les mêmes droits politiques et qu'il n'y a pas de hiérarchie naturelle à la base
de l'exercice de l'autorité politique.

http://www.cortecostituzionale.it/actionSchedaPronuncia http://www.nyustraus.org/pubs/1213/documents/

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