Systèmes - Droit gouvernemental - 1re - 155

La subordination jurisprudentielle

Cette jurisprudence, très critiquée, a rapidement fait l'objet de tempéraments jurisprudentiels qui en limitent la portée, le Premier ministre demeurant bien le titulaire incontesté de l'essentiel du pouvoir réglementaire. En
premier lieu, le Conseil d'État, dans son arrêt Allamigeon de 1994, a pris le
soin de préciser que la compétence présidentielle ne s'étend pas à l'ensemble de la matière concernée par le décret délibéré en Conseil des
ministres mais qu'elle se borne aux dispositions expressément
décrétées26. En second lieu, le Conseil d'État, sans revenir sur la jurisprudence Meyet, a permis par son arrêt Collas de 1996 « qu'on la contourne
élégamment » (Michel Lascombe). Afin d'éviter tout effet de cliquet, le SGG
peut introduire, dans un décret délibéré en Conseil des ministres, un article
de déméyétisation final prévoyant que ce décret pourra être modifié par
décret simple ou par décret en Conseil d'État27 et faisant échec à la jurisprudence Meyet28. Quant aux décrets du président de la République non
délibérés en Conseil des ministres, chacun sait qu'ils demeurent considérés
comme des décrets du Premier ministre selon une jurisprudence constante
(CE, 27 avr. 1962, Sicard).

3. La protection via le régime des « actes de gouvernement »
237. Les actes de gouvernement peuvent être définis comme des actes
du pouvoir exécutif non susceptibles de recours contentieux devant le juge
administratif.
La liste de ces actes reste pour le moins sommaire s'agissant de l'organisation gouvernementale. Au global, les actes de gouvernement concernent davantage les actes du président de la République que ceux du Gouvernement (ex : CE, 13 déc. 2017, président du Sénat).
Le Conseil d'État a toutefois protégé l'autonomie structurelle du Gouvernement en jugeant que constituaient des actes de gouvernement : les
décrets relatifs à la composition du Gouvernement (CE, 29 déc. 1999,
Lemaire) ainsi que les décrets de nomination d'un membre du Gouvernement (CE, 16 sept. 2005, Hoffer)29 au sens où ils organisent des « rapports
d'ordre constitutionnel institués entre le président de la République, le Premier ministre et le gouvernement ». Du reste, sans faire entrer explicitement la composition du Conseil des ministres dans le champ des actes de
Gouvernement, le Conseil d'État a jugé, qu'en l'absence de dispositions
constitutionnelles et législatives, la composition du Conseil des ministres
doit être laissée à la libre appréciation du président de la République et du
Premier ministre (CE, sect., 17 mai 1957, Simonet).

26. CE, 27 avr. 1994, Allamigeon et Pageaux.
27. Cf. par ex. : décret nº 2013-1069 du 27 novembre 2013.
28. Cette technique pour empêcher l'effet de cliquet est également prévue pour les décrets
en Conseil d'État (cf. CE, 19 févr. 2010, Molline et autres).
29. Cf. également : CE, 29 janv. 1965, Sieur Mollaret ; CE, 10 janv. 1958, Deville.

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