Systèmes - La globalisation, le droit et l'État - 3e - 220

La globalisation, le droit et l'État

1º. On peut trouver utile de dire, d'abord, qu'il existe des systèmes juridiques qui, en raison de leurs positionnements respectifs, n'interagissent
pas.
Il arrive que des ordres juridiques n'aient aucun point de contact, parce
qu'ils sont en quelque sorte situés aux antipodes du monde juridique : on
peut penser que l'ordre juridique local d'une commune italienne et l'ordre
juridique national coréen sont traditionnellement dans ce cas.
Il arrive, ensuite, que des parties de systèmes juridiques soient protégées des influences externes. C'est la technique de l'insulation, qui protège
certains concepts de l'influence du droit européen3. C'est la notion d'ordre
public qui, dans le droit des conflits de lois, limite l'application de la loi
étrangère par les juridictions nationales. C'est aussi la garantie constitutionnelle, lorsqu'elle tend à exclure tout impact d'une norme externe sur
une question donnée.
Il arrive encore que des ordres juridiques mis en contact dans un
contexte donné soient incapables d'interagir. Cela peut se produire, dans
les situations qu'envisage le droit international privé, en cas de conflits
entre deux normes de conflits : ces dernières étant nationales, elles peuvent, dans un cas donné, ne pas coïncider au point de laisser sans solution
le problème du droit applicable à une situation donnée.
La question que l'on doit ajouter est la suivante : est-ce qu'un rapport
purement hiérarchique est un rapport d'interaction ? On répondrait a priori
non, comme le faisait Santi Romano lorsqu'il considérait les rapports entre
ordres juridiques nationaux et collectivités territoriales. Pourtant, on peut
préférer une réponse à la Michel Foucault, proposant d'admettre que le
pouvoir est toujours un rapport réciproque, et plaider que, dès lors qu'une
entité subordonnée dispose du minimum d'autonomie qui lui permet
d'émettre des normes juridiques propres, la relation est nécessairement
un minimum bilatérale. Cette vision de réciprocité peut être utile à l'appréhension de diverses réalités contemporaines.
2º. On peut ensuite proposer diverses distinctions.
On peut suggérer en premier lieu de distinguer l'interaction entre ordres
juridiques qui est due véritablement à des effets de droit, de celle qui passe
par l'influence intellectuelle, doctrinale ou jurisprudentielle. Le premier cas
est celui dans lequel l'interaction est imposée par une norme juridique donnée, qui peut être hiérarchique, ou de coordination. Le second est celui dans
lequel un système juridique est influencé par un autre, non pas parce qu'il y
est contraint par une norme quelconque, mais parce que ses autorités juridiques ont jugé certaines solutions de ce système suffisamment pertinentes
pour qu'elles aient souhaité les importer.

3. Gérard MARCOU (dir.), Les mutations du droit de l'administration en Europe, L'Harmattan,
2000, p. 31.

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