Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 31 - Le juriste entre science et politique - 187

À LA RECHERCHE D'UNE RÉNOVATION MÉTHODOLOGIQUE

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est mise en avant, comme on l'a relevé. Il faudra attendre en réalité 1938 un article
de Jean Carbonnier485, étudiant de Bonnecase, pour renouer avec une partie historique conséquente, sans qu'il y ait de plaidoyer en faveur de la méthode historique486,
l'auteur s'en tenant au fond du sujet.
364. Dans le débat sur l'existence d'un repli identitaire consécutif à l'avènement de l'histoire du droit487, on peut verser certaines mentions relevées dans la
Revue Générale comme une preuve, de portée relative on en conviendra, d'une certaine fermeture. En effet, tandis que la grande majorité des ouvrages historiques
mentionnés avant 1900 ne sont pas toujours assortis d'une mention sur le type de
public auquel elles s'adressent en priorité, l'on constate l'apparition de cette précision à partir du début du siècle488. Certains ouvrages sont ainsi à conseiller particulièrement aux historiens du droit, et non plus à l'ensemble des juristes. Cela peut
être un indice de cloisonnement disciplinaire et d'une dépréciation de l'histoire en
tant qu'outil intellectuel pour l'enseignement de la communauté des juristes. En
1915, Lefort va même jusqu'à se justifier, en quelque sorte, de mentionner un
ouvrage sur l'histoire de l'Antiquité : « notre intention n'est pas de suivre
M. Cavaignac. Mais nous considérons qu'il est de notre devoir de relever dans une
Revue de droit ce qui a trait à l'histoire du droit, des institutions et des mœurs »489.
365. À l'issue de ce panorama contrasté, qui a mis en relief la croyance chez
certains de la réelle utilité d'une méthode historique, mais concomitamment la
faible mobilisation de cette dernière, l'histoire étant une voie empruntée comme un
passage obligé et sans qu'un profit heuristique en soit tiré, il semblerait qu'une réelle
« méthode historique » soit davantage le fait de quelques individualités. Ses représentants et zélateurs, au premier chef le professeur lyonnais Charles Appleton,
trouvent spécialement dans le droit romain un espace d'expression privilégié.
B. DE LA MÉTHODE APPLICABLE EN DROIT ROMAIN
366. Avant d'aborder la question de savoir quelle méthode utiliser dans l'étude
du droit romain, et de présenter le plaidoyer d'Appleton pour la méthode historique, il n'est pas inutile pour la compréhension des enjeux, de présenter quelques
485. « Introduction à une étude de la liberté individuelle dans l'instruction criminelle », Revue
Générale, 1938, tome 62, p. 44-72.
486. Sur la place de l'histoire dans la méthode de Carbonnier, cf. J. Poumarède, « L'histoire dans
l'œuvre et la méthode sociologique du doyen Carbonnier », L'année sociologique, 2007, tome 57-2,
p. 313-326.
487. Nuançant les propos de Jacques Poumarède (qui souligne également le poids des romanistes
dans l'enfermement de la discipline historique : « Pavane pour une histoire du droit..., op.  cit.,
p. 96-98), Jean-Louis Halpérin n'impute pas au sectionnement du concours de l'agrégation l'unique
responsabilité du repli disciplinaire de l'histoire du droit, car il estime que des « équivoques sur son
statut » étaient décelables avant 1896 : « L'histoire du droit constituée en discipline... » op. cit., p. 26.
Il réitère un jugement nuancé à l'aune de son étude sur les premiers agrégés d'histoire du droit : « La
première génération d'agrégés d'histoire du droit », dans Histoire de l'histoire du droit, op. cit., p. 264.
488. Quelques illustrations : G.  Bérard, compte rendu La condition juridique des croisés et le
privilège de croix de Bridrey, Revue Générale, 1902, tome 26, p. 182-183 ; V. Teissier, compte rendu Le
mouvement de 1314 et les chartes provinciales de 1315 d'A. Artonne, Revue Générale, 1912, tome 36,
p. 359-360 ; J. Lefort, compte rendu Les banquiers dans la législation de Justinien de Platon, Revue
Générale, 1913, tome 37, p. 58-65 ; J. Valéry, compte rendu Histoire du droit commercial d'A. Lattes,
Revue Générale, 1913, tome 37, p. 188-189 ; C. Chabrun, compte rendu De la nullité et de la dissolution
du mariage dans la législation serbe de Péritch, Revue Générale, 1914, tome 38, p. 290-291.
489. Compte rendu Histoire de l'Antiquité d'E. Cavaignac, Revue Générale, 1915, tome 39,
p. 83-85.
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