Grands Colloques - L'européanisation du droit - 64

L'EUROPÉANISATION DU DROIT PÉNAL

ceci pour garantir l'uniformité et la primauté du droit de l'UE51. D'après
C. Achaintre, « cette DC, sous une apparence mineure, fut en réalité
porteuse d'une révolution (...) le MAE est le fruit d'un dispositif hybride
(...) savant mélange de supranationalité et de coopération interétatique » 52.
D'autres instruments ont été mis en place sur le fondement de la reconnaissance mutuelle, pierre angulaire de l'ELSJ, telle que la DC sur le
mandat européen d'obtention de preuve de 2009 qui a été remplacé par
la décision d'enquête européenne en matière pénale créée par la directive
du 3 avril 201453. La décision européenne d'enquête met ainsi en œuvre
le principe de reconnaissance mutuelle dans le domaine de la collecte des
éléments de preuve. Elle sera émise à la fois pour faire réaliser une enquête
spécifique dans l'État d'exécution et pour obtenir des preuves déjà en sa
possession. À la demande du Parlement européen, la directive introduit
pour la première fois un motif de refus fondé sur les droits fondamentaux
et devra être transposée par les États membres avant le 22 mai 201754.
Si la reconnaissance mutuelle a été reconnue comme étant la pierre
angulaire de l'espace pénal européen, le traité de Lisbonne réserve une
place également centrale à l'harmonisation de la procédure pénale. Les
ajustements de la procédure pénale résultant de la reconnaissance mutuelle
ne concernent qu'un nombre limité d'affaires transnationales55. Alors
que le MAE ne concerne que des infractions d'une certaine gravité56, le
rapprochement des législations relatives à la procédure pénale a vocation à
concerner beaucoup plus d'infractions. Le traité de Lisbonne introduit pour
sa part une réelle révolution dans la procédure pénale puisqu'il prévoit un
fondement juridique permettant le rapprochement de la procédure pénale
des États telle qu'elle s'applique à toutes les enquêtes, qu'elles aient ou non
un caractère transfrontalier.
51. H. Labayle, « Mandat d'arrêt européen et degré de protection des droits fondamentaux, quand la confiance se fait aveugle », www.gdr-elsj.eu, 3 mars 2013 ; M. Benlolo
Carabot, « Mandat d'arrêt européen : la protection des droits fondamentaux subordonnée
aux exigences de la primauté du droit de l'Union européenne », Lettre « Actualités DroitsLibertés » du CREDOF, 22 mars 2013.
52. C. Achaintre, « La France face au mandat d'arrêt européen » in Regards sur le droit
de l'Union européenne après l'échec du traité constitutionnel, p. 265-294.
53. Directive n° 2014/41/UE, JOUE L 130, 1er mai 2014, p. 1-36. Délai de transposition
jusqu'au 22 mai 2017.
54. T. Cassuto, « La directive concernant la décision d'enquête européenne en matière
pénale », J. Pénal, 2014, p. 338.
55. En France, il y a à peu près 1 000 MAE émis et 1 000 reçus chaque année.
56. Infractions pour lesquelles la peine encourue est d'au moins deux ans de prison pour
le transfert à des fins de jugement et infractions pour lesquelles quatre mois de prison ont
été prononcés pour le transfert à fin d'exécution de la peine.

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