Grands Colloques - L'avenir du droit des biens - 35

NICOLAS DISSAUX

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2. La consécration
Quelle consécration? Eh bien celle de la définition civiliste du patrimoine
justement ! Car il faut bien le relever : pour lors, cette définition ne procède
d'aucun texte normatif. Chacun le sait : elle est toute doctrinale, issue des
travaux d'Aubry et Rau. Or donc... voilà que l'avant-projet de réforme du
droit des biens rédigé sous les auspices de M. Périnet-Marquet propose dans
sa version finale du 15 mai 2009 un nouvel article 519 du Code civil ; un
article 519 qui disposerait que « le patrimoine d'une personne est l'universalité de droit comprenant l'ensemble de ses biens et obligations, présents
et à venir, l'actif répondant du passif ». Et le second alinéa de poursuivre :
« toute personne physique ou morale est titulaire d'un patrimoine et, sauf
si la loi en dispose autrement, d'un seul ».
Deux remarques sur cette proposition.
Première remarque : en apparence, elle n'est pas innovante. On l'a d'ailleurs quelque peu critiquée pour ça. De quoi le législateur se mêlerait-il de
poser une définition doctrinale6 ? « Fallait-il vraiment transformer en règle
de droit positif ce qui peut apparaître avant tout comme un instrument
pédagogique ? »7. Et pourquoi reprendre la définition classique issue des
travaux d'Aubry et Rau alors même que ceux-ci font l'objet d'une perpétuelle critique8.
À suivre M. Zenati-Castaing, il s'agirait là d'une vision « datée » ; d'une
« conception exclusivement pécuniaire des biens » qui « appartient au
passé»9. De fait, nombreuses sont les voix qui s'élèvent contre une définition
si personnaliste du patrimoine. Que le patrimoine ne soit que la projection
d'une personne sur un plan pécuniaire, voilà qui ne relève plus en effet du
tout de l'évidence. Que le patrimoine n'englobe pas les droits de la personnalité au motif que ceux-ci seraient dépourvus de dimension pécuniaire,
cela n'est pas beaucoup plus réaliste aujourd'hui10. On le sait : la distinction
6. V. en ce sens F. Zenati-Castaing, « La proposition de refonte du livre II du Code
civil », Rev. trim. dr. civ. 2009, p. 211 et s., spéc. no 4.
7. W. Dross et B. Mallet-Bricout, « L'avant-projet de réforme du droit des biens »,
D. 2009, 508.
8. On ne reprendra pas ici les sempiternelles critiques sur le principe de l'unicité du
patrimoine. Sur lesquelles v. « Le fabuleux destin de la théorie de l'unicité du patrimoine »,
in Revue de droit Henri Capitant, 2011, no 2. V. aussi M. Mekki, art. préc. Au demeurant,
cette théorie classique n'est peut-être pas si antinomique avec celle, traditionnellement
présentée comme concurrente, du patrimoine d'affectation. V. en ce sens, P. Berlioz,
« L'affectation au cœur du patrimoine », Rev. trim. dr. civ. 2011, p. 635 et s.
9. F. Zenati-Castaing, « La proposition de refonte du livre II du Code civil »,
Rev. trim. dr. civ. 2009, p. 211 et s., spéc. no 6.
10. M. Zenati-Castaing le relève également : « L'article 519 [...] reprend la conception du
patrimoine d'Aubry et Rau, issue d'une doctrine inspirée par le volontarisme allemand de
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