Grands Colloques - L'avenir du droit des biens - 73

PHILIPPE CHAUVIRÉ

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privilégié pour une analyse économique, et le contexte de concurrence
des systèmes juridiques paraît être actuellement un puissant moteur de
réforme, ainsi qu'en témoignent les motifs qui ont conduit à l'adoption
d'une fiducie à la française14.
En prévision d'une possible réforme, il reste à explorer, de manière
prospective, les différents scenarii possibles pour une remise à plat de la
propriété. Quelles pourraient être les pistes pour conforter ou, au besoin,
adapter la propriété aux exigences actuelles ? Il est évidemment impossible
d'anticiper sur les choix du législateur dont on ne sait même pas s'il est
décidé à réformer la matière. Tout au plus est-il possible d'avancer quelques
propositions, sans prétendre à l'exhaustivité, pour formaliser certaines
modifications envisageables.
Il apparaît ainsi que l'avenir de la propriété peut être abordé sous deux
angles différents. Il s'agit avant tout de rechercher si la propriété, telle
qu'elle est conçue à l'article 544, a encore un futur radieux, ou si elle n'a
pas, au contraire, été obscurci par les évolutions législatives ou les interventions jurisprudentielles. Une autre approche consiste à envisager les formes
possibles que la propriété pourrait, en cas de réforme, adopter demain.
C'est ce que l'on peut résumer en deux questions : quel avenir pour notre
propriété ? Quelle propriété pour l'avenir ?

I - QUEL AVENIR POUR NOTRE PROPRIÉTÉ ?
Cette interrogation suppose que l'on s'entende sur notre conception
actuelle de la propriété ainsi que sur ses caractères. Si la propriété est
analysée de manière différente selon les courants doctrinaux, un consensus
peut néanmoins être trouvé autour de trois adjectifs : la propriété est décrite
comme perpétuelle, exclusive et absolue15. Toute la difficulté consiste donc
à apprécier la persistance ou l'affaiblissement de ces caractères. La mesure
n'est pas simple à réaliser, car tout semble affaire de nuances. Il apparaît
toutefois que, malgré une solidité de façade (A), les fondations de l'édifice
de l'article 544 sont aujourd'hui fragilisées (B).
14. Le sénateur Marini, à l'initiative de la loi du 19 févr. 2007, a ainsi déclaré : « cet enjeu
de compétitivité du droit français, auquel je suis depuis longtemps attentif, a dès lors constitué la principale motivation de ma proposition de loi », Ph. Marini, « Enfin la fiducie à la
française ! », D. 2007, p. 1348.
15. Ph. Malaurie, L. Aynès, Les biens, Defrénois, 5e éd., 2013, no 455 ; F. Terré,
Ph. Simler, Les biens, 8e éd., Dalloz, 2010, no 140 ; W. Dross, Les choses, LGDJ, 2012,
no 41, 42 et 78 ; J.-L. Bergel, M. Bruschi, S. Cimamonti, Les biens, 2e éd., LGDJ, coll.
Traité de droit civil, 2010, no 92 ; G. Cornu, Les biens, 13e éd., LGDJ, Domat, 2007, no 28.
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