Systèmes - Droit de la régulation audiovisuelle - 1re - 53

Les secteurs public et privé

territoire imposée aux sociétés du secteur public31, assortie d'un droit à
l'antenne au profit des particuliers32. Depuis que l'acheminement des programmes s'effectue sur d'autres réseaux, par l'intermédiaire de distributeurs qui se chargent de commercialiser des bouquets de programmes
(supra nº 44), l'accès du public nécessite d'autres dispositifs.
Celui retenu par le législateur est inspiré du droit communautaire. La
directive « service universel » du 7 mars 2002 permet en effet aux États
d'imposer aux « fournisseurs de réseaux », sous certaines conditions33, de
diffuser les programmes de services de radio ou de télévision hertziens,
lorsque l'intérêt général le justifie. Alors qu'en droit européen, cette obligation de reprise - « must carry » - ne concerne que les opérateurs techniques
(les « fournisseurs de réseaux »), c'est-à-dire les sociétés en charge des
seuls réseaux qui n'interviennent pas sur les contenus34, elle a été est étendue par le législateur français aux distributeurs de services. La loi du 9 juillet 200435 impose ainsi aux distributeurs de services de mettre gratuitement
à la disposition de « leurs abonnés » (nous verrons l'importance de cette
condition, infra nº 73) les programmes de France Télévisions, de la chaîne
Arte et ceux de TV5 Monde, les coûts de transport et de diffusion de ces
reprises étant à la charge des distributeurs (L. 1986, art. 34-236). La compatibilité de ce dispositif avec le droit de l'Union a été récemment reconnue
par la Cour de justice37 : même si les distributeurs de services de la loi de
1986 ne sont pas des fournisseurs de réseaux, au sens de la directive « service universel », celle-ci n'interdit pas aux États d'assujettir les distributeurs
à l'obligation « must carry ».

31. L'article 44-I de la loi de 1986 faisait originellement obligation aux chaînes publiques de
télévision de diffuser sur l'ensemble du territoire métropolitain.
32. Énoncé par la loi nº 66-457 du 2 juill. 1966, le droit d'antenne interdit au propriétaire d'un
immeuble de s'opposer à ce que les locataires installent et se raccordent à une antenne
extérieure réceptrice de radiodiffusion. Il a été étendu par la loi du 30 déc. 1990 au réseau
câblé et par la loi du 4 août 2008 au réseau en fibre optique (ces lois ont modifié la loi du
2 juill. 1966).
33. L'obligation de reprise est imposée aux « entreprises qui... fournissent des réseaux de
communications électroniques... lorsqu'un nombre significatif d'utilisateurs finals utilisent ces réseaux comme leur moyen principal pour recevoir des chaînes de radio et de
télévision. Ces obligations ne sont imposées que lorsqu'elles sont nécessaires pour
atteindre des objectifs d'intérêt général clairement définis par chaque État membre, et
sont proportionnées et transparentes » (dir. 2002/22/CE, art. 31).
34. Voir considérant 45 de la directive 2002/22/CE.
35. Initialement, cette obligation ne concerne que la Chaîne parlementaire, dont la reprise
est imposée aux sociétés diffusant des programmes par satellite ou par câble (L. 30 déc.
1999 qui crée l'art. 45-3 de la loi de 1986). La loi du 1er août 2000 impose aux distributeurs
satellitaires de diffuser l'ensemble des chaînes publiques (L. 1986, art. 34-3). La loi du
9 juill. 2004 étend l'obligation à tous les distributeurs de services, quel que soit le réseau
utilisé (L. 1986, art. 34-2).
36. L'article 34-2 de la loi de 1986 permet aux sociétés publiques de s'opposer à cette reprise
si elles estiment que l'offre de services est « manifestement incompatible » avec le respect de leurs missions de service public.
37. CJUE, 13 déc. 2018, aff. C-298/17 (arrêt rendu à la suite de la question préjudiciée posée
CE, 10 mai 2017, nº 391519, Sté France Télévisions, inédit).

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