Hors collection - 1975-2015 - De quelques aspects contemporains de la sous-traitance - 109

SOUS-TRAITANCE ET RESPONSABILITÉS ENVERS LES TIERS

103

prescriptions de cette disposition, autrement dit susceptible d'être qualifié
d'EPERS20. Toutefois, compte tenu de la rareté de cette qualification, une
telle responsabilité est peu mise en œuvre.
En dehors de cette hypothèse, le sous-traitant est tenu et doit l'être sur
le fondement du droit commun de la responsabilité extracontractuelle. Il
répond seulement de ses agissements fautifs.
La faute requise peut être de deux ordres. Soit le sous-traitant a commis
une faute envers le maître de l'ouvrage. Il en va ainsi chaque fois que le
sous-traitant a manqué à son devoir de conseil21. En guise d'illustration,
un tel manquement est caractérisé lorsqu'il n'a pas informé le maître de
l'ouvrage des inconvénients de la solution technique qui a été adoptée22.
La jurisprudence considère ainsi que le sous-traitant est tenu à un devoir
de conseil envers le maître de l'ouvrage alors même qu'il n'est pas son
cocontractant. Les frontières entre le contrat d'entreprise principal et le
sous-traité s'en trouvent ainsi effacées pour protéger le bénéficiaire final
de la prestation réalisée.
Soit le maître de l'ouvrage peut invoquer la défaillance contractuelle
du sous-traitant à l'égard de l'entrepreneur principal23. Se pose alors la
question de savoir si la preuve du manquement contractuel suffit par
lui-même à démontrer la faute au sens de l'article 1382 du Code civil. Sur
ce point, la jurisprudence a évolué. Après avoir rejeté l'assimilation des
fautes contractuelle et délictuelle24, elle considère désormais que les tiers
à un contrat peuvent invoquer un manquement contractuel dès lors que
ce manquement leur a causé un dommage, sans avoir à rapporter d'autre
preuve25. La solution, en ce qu'elle facilite la preuve de la faute, est avantageuse pour le maître de l'ouvrage. Elle revient même à le dispenser d'avoir à
prouver une faute chaque fois que le sous-traitant est tenu à une obligation
de résultat26. À l'inverse, elle est corollairement défavorable au soustraitant, qui est condamné dans des conditions différentes de celles qu'il
avait pu envisager dans le contrat conclu avec l'entrepreneur principal. En
20. Cass. 3e civ., 4 janv. 2006, Bull. civ. III, n° 1.
21. V. C. Charbonneau, « De l'obligation de conseil du sous-traitant », RDI 2010,
p. 593.
22. Cass. 3e civ., 9 juin 2004, n° 02-20292.
23. Pour illustrations, Cass. 3e civ., 10 janv. 2001, Bull. civ. III, n° 3 ; 3 janv. 2006,
n° 04-18455.
24. Cass. 3e civ., 22 juin 1988, Bull. civ. III, n° 115 : « L'obligation de résultat d'exécuter
des travaux exempts de vices, à laquelle le sous-traitant est tenu vis-à-vis de l'entrepreneur
principal a pour seul fondement les rapports contractuels et personnels existant entre eux
et ne peut être invoquée par le maître de l'ouvrage, qui est étranger à la convention de
sous-traitance ».
25. Cass. ass. plén., 6 oct. 2006, Bull. civ., n° 9.
26. C'est-à-dire lorsque la prestation qui lui est confiée est matérielle.
Hors collection - 1975-2015 - De quelques aspects contemporains de la sous-traitance

Table des matières de la publication Hors collection - 1975-2015 - De quelques aspects contemporains de la sous-traitance
