Hors collection - 1975-2015 - De quelques aspects contemporains de la sous-traitance - 27

SOUS-TRAITANCE ET MARCHÉS PUBLICS

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Le droit privé ne retient pas cette conception. La sous-traitance n'est
qu'une faculté pour l'entrepreneur principal et non un droit30, dans la
mesure où « l'obligation de faire ne peut être acquittée par un tiers contre
le gré du créancier, lorsque ce dernier a intérêt qu'elle soit remplie par le
débiteur lui-même »31. Rien n'empêche alors la sous-traitance totale - pour
peu qu'elle soit consentie par le maître de l'ouvrage - ni même d'imposer
de manière contractuelle à l'entrepreneur l'exécution personnelle de l'intégralité de ses prestations. La liberté de contracter est ici beaucoup plus
étendue qu'en droit de la commande publique. Ceci ne veut pas dire que les
pouvoirs adjudicateurs perdent toute liberté de choix. Il faut simplement
relever que le droit administratif retient une conception particulière de
l'intuitus personae, plus « objectivée »32 que celle retenue traditionnellement
par le droit privé. Un marché public, même en procédure formalisée,
reste en effet conclu en considération de la personne du cocontractant,
appréciée au regard de sa capacité à répondre aux critères objectifs posés
dans le dossier de consultation. Les pouvoirs adjudicateurs ne contractent
jamais avec n'importe qui, bien au contraire, et les procédures formalisées
ne limitent en réalité que leur liberté de contracter - ils ne peuvent tout
simplement pas contracter n'importe comment.
Le principe d'exécution personnelle du marché, en liaison avec
l'intuitus personae, est à même d'expliquer ce principe d'interdiction de
la sous-traitance totale, même si une harmonisation entre le droit privé
et le droit public est à prévoir. La directive européenne sur la passation
des marchés du 26 février 2014 énonce que « les pouvoirs adjudicateurs
peuvent exiger que certaines tâches essentielles soient effectuées directement par le soumissionnaire lui-même »33. L'ordonnance n° 2015-899
du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics34 se contente toutefois de
reprendre cette formulation, sans présager de la définition qui sera donnée
de la notion de « tâche essentielle ».
C'est également le principe d'exécution personnelle des prestations qui
justifie la recherche obligatoire du consentement du pouvoir adjudicateur.

30. V. en ce sens : A. Bénabent, « Sous-traitance : formation », D. act. dr. constr., n° 511,
2013.
31. C. civ., art. 1237.
32. A. Antoine, « L'intuitus personae dans les contrats de la commande publique », RFDA
2011, p. 879.
33. Art. 63.2 de la directive 2014/24/UE du 26 févr. 2014 sur la passation des marchés
publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.
34. Art. 62-I de l'ordonnance, JORF, 24 juill. 2015.
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