Hors collection - 1975-2015 - De quelques aspects contemporains de la sous-traitance - 82

L'ENVIRONNEMENT

d'ordre ? Les salariés du sous-traitant, en travaillant sur le site du donneur
d'ordre, partagent des conditions de travail avec les salariés de ce dernier
ou avec d'autres salariés présents sur le site. Depuis longtemps, la situation
de co-activité a été saisie par le droit. Des droits collectifs ont été aménagés
pour qu'ils puissent s'exprimer au sein de l'entreprise d'accueil. Or,
l'aménagement des droits collectifs chez le donneur d'ordre s'avère-t-elle
pertinente dès lors que la sous-traitance repose justement sur une gestion
différenciée de l'emploi ? La prise en compte de la communauté de travail
est-elle suffisante alors que la détermination des conditions de travail relève
de la compétence du sous-traitant et que ses décisions sont tributaires de
son contrat passé avec le donneur d'ordre et donc des choix stratégiques
de ce dernier ? En outre, la première dimension de la sous-traitance liée à la
co-activité laisse aujourd'hui largement place à une autre, celle des réseaux
d'entreprises, avec ou hors d'une situation de co-activité. L'opération de
sous-traitance n'implique plus nécessairement des conditions de travail
communes entre les salariés du sous-traitant et ceux du donneur d'ordre.
Les salariés des différentes entreprises ne travaillent pas forcément sur le
même site mais participent à un même processus de production. Que la
dépendance économique entre le sous-traitant et un donneur d'ordre soit
exclusive ou non, qu'il y ait domination ou non, les entreprises de soustraitance subissent l'impact, en termes d'emploi, des décisions stratégiques
prises par le donneur d'ordre. En outre, les entreprises appartenant à une
même filière - sous-traitance dite de « filière d'activité » -, sont souvent
soumises à des évolutions parallèles de l'activité et des emplois. Dans
un contexte de mondialisation associé à cette volonté de différencier la
gestion de l'emploi grâce à l'activité de sous-traitance, la question des
droits fondamentaux se pose également avec acuité. Dès lors, est-ce que
la garantie de droits collectifs réels, effectifs pourrait permettre de réduire
l'impact des choix stratégiques du donneur d'ordre sur les salariés du soustraitant, autrement dit contrarier les effets de la dépendance économique
du sous-traitant à son ou ses donneurs d'ordre ?
Plan. Après avoir analysé dans quelle mesure l'existence de conditions
de travail communes permet de justifier la mutation de droits collectifs
au profit des salariés du sous-traitant (I), il conviendra de s'interroger sur
la manière de garantir des droits collectifs effectifs pour les salariés du
sous-traitant en vue de responsabiliser le donneur d'ordre dans ses choix
stratégiques (II).

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